17.Juil.2015 | Au fil de l'eau | Laissez un commentaire

Deux revues et un peu de drone music.

Au fil de l'eau

Si vous avez envie de lire sur les rapports entre drones, cinéma et art contemporain pendant les vacances, je vous signale la parution récente de deux revues :

– un numéro double de la revue suisse Décadrages (certes, paru en Octobre dernier, mais que je n’ai pu me procurer que récemment), dirigé par Claus Gunti et intitulé « Drones, cartographies et images automatisées ». Le numéro inclut (parmi d’autres articles très approfondis, signés Alain Boillat, Selim Krichane, Claus Gunti, Laurence Kubski, Marc-André Weber et Joël Vacheron) une traduction d’un texte de Derek Gregory, « Géographies du drone ». Vous pouvez télécharger l’éditorial du numéro sur le site de Décadrages, ici.

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12.Juil.2015 | Carte postale | Laissez un commentaire

Cimetière marin vu du ciel,
par Lúcia Ramos Monteiro.

Carte postale

Cette première carte postale nous arrive de Santiago du Chili, via São Paulo, où habite actuellement Lúcia Ramos Monteiro, critique d’art et de cinéma. T.C.

Enrique Ramirez, Los durmientes, film 4K (2014)

Enrique Ramirez, Los durmientes, film 4K (2014)



« Oui ! grande mer de délires douée,
Peau de panthère et chlamyde trouée,
De mille et mille idoles du soleil,
Hydre absolue, ivre de ta chair bleue,
Qui te remords l’étincelante queue
Dans un tumulte au silence pareil

Le vent se lève! … il faut tenter de vivre !
L’air immense ouvre et referme mon livre,
La vague en poudre ose jaillir des rocs!
Envolez-vous, pages tout éblouies!
Rompez, vagues! Rompez d’eaux réjouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs! »

Paul Valéry

L’espace d’expositions temporaires du Musée de la Mémoire (Museo de la memoria y los derechos humanos) accueille jusqu’à la fin août l’exposition Los durmientes, el exilio imaginado, présentant une série d’œuvres de l’artiste Enrique Ramirez (Santiago, 1979), qui vit entre Paris et Santiago du Chili.

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9.Juil.2015 | Ciné-club | 1

Aspect, ou l’« être-forêt ».

Ciné-club



Emily Richardson, Aspect (extrait), film 16mm, 9 min, 2004.

« Parfois le film nous procure une perception de l’être-montagne ou de l’être-mer. C’est un sentiment comme l’évidence à laquelle toute démonstration s’arrête, et où il n’y a rien à dire », écrivait, en 1935, le cinéaste Jean Epstein. Dans Aspect, film 16 mm tourné en 2009 par l’artiste britannique Emily Richardson, c’est l’être-forêt qu’on voit – et qu’on entend.

Epstein est l’un des grands penseurs de l’animisme au cinéma, sur l’écran duquel il ne voit jamais de nature morte. Indissociable du mystère de la photogénie, l’animisme est, tout d’abord, et pour le cinéaste français, une question de ressources expressives propres au cinéma, du gros plan à la manipulation des vitesses de l’image (le ralenti, l’accéléré). Ce sont ces formes qui confèrent aux objets des attitudes et qui balayent les frontières entre l’inerte et le vivant. Emily Richardson s’appuie précisément sur une technique classique de l’animation : le time-lapse, ou la prise de vues en ultra-accéléré. Elle condense ainsi un an d’observation et de tournage en neuf minutes de film.

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3.Juil.2015 | Au fil de l'eau | Laissez un commentaire

“GODS KILL”
par Emmanuel Siety

Au fil de l'eau

Ce billet est la première de plusieurs invitations à venir et il a été rédigé par mon collègue Emmanuel Siety, maître de conférences en études cinématographiques et audiovisuelles à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Qu’il soit vivement remercié pour cette contribution – qui revient, de façon un peu plus détaillée, sur le film Good Kill d’Andrew Niccol. Teresa Castro.

Good Kill d'Andrew Niccol, 2014

Good Kill d’Andrew Niccol, 2014

Si les campagnes politiques sont affaire de « storytelling », il semble que les relations internationales, et en particulier leur forme extrême qu’est la guerre, soient affaire de « narrative ». Si vous faites la guerre, il vaut mieux que vous ayez des arguments, mais il vous faut aussi une histoire à raconter, et une histoire plutôt aristotélicienne, avec un début, un milieu et une fin, avec un conflit et une résolution.

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30.Juin.2015 | Au fil de l'eau | Laissez un commentaire

Le coup d’œil militaire

Au fil de l'eau
Good Kill d'Andrew Niccol, 2014

Good Kill d’Andrew Niccol, 2014

J’étais de passage à Tours la semaine dernière, où j’ai découvert, au Musée des Beaux-Arts, un ensemble de trois tableaux célébrant les campagnes militaires de Louis XIII et de Richelieu (Le Combat du Pas-de-Suse, La Capitulation de Privas et La Prise de Pignerol). En regardant ces images oscillant entre peinture d’histoire, vue de paysage et cartographie, je me suis rappelée la notion de coup d’œil militaire. Il s’agit d’une formule répandue pendant l’Ancien Régime, et plus particulièrement au XVIIIe siècle, quand le coup d’œil devient un véritable régime du regard, bien plus complexe qu’on ne pourrait l’imaginer (comme je l’appris récemment en écoutant une présentation passionnante de l’historienne de l’art Charlotte Guichard). Le coup d’œil militaire a même droit à une entrée dans l’Encyclopédie, où on le définit comme « l’art de connoitre la nature & les différentes situations du pays, où l’on fait et où l’on veut porter la guerre, les avantages & les désavantages des camps & des postes que l’on veut occuper, comme ceux qui peuvent être favorables ou desavantageux à l’ennemi ». Si le coup d’œil militaire est la prérogative des généraux et des grands capitaines, il s’entraîne et il se perfectionne, afin de tout voir et de tout prévoir ; en ce sens, « rien (…) ne contribue davantage à former le coup d’œil que l’exercice de la chasse », lit-on toujours dans l’Encyclopédie.

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22.Juin.2015 | Ciné-club | 2

Un arbre.

Ciné-club



Katia Maciel, Uma Árvore (Un Arbre), installation vidéo, 2009 © Katia Maciel

J’ai décidé d’inaugurer la section « ciné-club » avec une vidéo de l’artiste brésilienne Katia Maciel intitulée Uma Árvore (Un Arbre, 2009). Cette vidéo avait été exposée l’année dernière à la Maison Européenne de la Photographie, lors d’une exposition consacrée au travail de Katia et intitulée « Répétitions ». On y voit un arbre dont les branches se contraignent et se relâchent en boucle, comme si ce majestueux être touffu respirait devant nous et n’était autre qu’un grand cœur qui bat.

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16.Juin.2015 | Au fil de l'eau | 2

Les tapis volants du XXIe siècle ? (suite et fin)

Au fil de l'eau
The Firedrake (or dragon), a kite with its tail aflame, an engraving from The Mysteries of Nature and Art by John Bate published in 1634

“The Firedrake (or dragon)”. Gravure in The Mysteries of Nature and Art de John Bate, 1634.

Voici encore quelques notes inspirées par l’exposition « Le Paradis et l’Enfer. Des tapis volants aux drones » (6 mars – 6 septembre 2015). Comme je l’ai déjà expliqué, le rapprochement effectué entre drones et tapis volants me semble très suggestif – mais, il n’est pas le seul lien à être proposé par l’exposition bruxelloise. Celle-ci s’intéresse aussi aux cerfs-volants, appareils trouvant leurs origines en Chine il y a plus de 2000 ans et dont la pratique est encore largement répandue en Asie, en particulier au Moyen-Orient. Bien que l’exposition se tienne à une simple évocation de ce motif dans la production artistique « orientale » (notamment à travers une pièce de Rirkrit Tiravanija et de quelques extraits de films), le cerf-volant appartient bel et bien à l’archéologie médiatique du drone.

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9.Juin.2015 | Au fil de l'eau | Laissez un commentaire

Les tapis volants du XXIe siècle ? Archéologie(s) du drone.

Au fil de l'eau



The Thief of Bagdad (extrait) de Ludwig Berger, Michael Powell et Tim Whelan, 1940.

La fondation Boghossian (Bruxelles) présente en ce moment une exposition intitulée « Le Paradis et l’Enfer. Des tapis volants aux drones » (6 mars – 6 septembre 2015), dont un des aspects les plus intéressants est celui d’établir un lien entre ces deux objets a priori fort éloignés que sont le tapis volant et le drone. Le premier est un fantasme et le deuxième une réalité, dont une bonne partie des effets se fait sentir (pour ce qui est des avatars militaires du drone) sur les contrées « orientales » que l’« Occident » imaginait auparavant peuplées de tapis volants et de lampes merveilleuses, mais qui recèlent aujourd’hui de multiples menaces (et qui, à dire vrai, furent toujours inquiétantes). C’est une des forces de cette exposition : celle d’inscrire les attaques aériennes menées actuellement par ces engins volants pilotés à distance dans l’histoire longue de l’Orientalisme, tel que l’envisageait Edward Saïd en 1978.

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27.Mai.2015 | Non classé | Laissez un commentaire

Drones d’idées

Non classé

Drones d’idées. Voici, sans doute, un jeu de mots un peu facile pour intituler un carnet de notes qui se veut justement cela : un calepin (virtuel) où noter quelques impressions et pensées au gré des rencontres, des lectures, des films vus et revus, des passions et des hésitations intellectuelles.

Dans « drones d’idées », il y a drone, un être technique multiforme qui n’a rien de drôle, mais que nous ne pouvons plus esquiver. De quoi le drone est-il le nom ? D’une machine fatale, pilotée à distance par l’entremise des technologies satellitaires, et employée (à mauvais escient) par les armées modernes. D’un engin volant répondant encore et toujours aux fantasmes anciens de parcourir l’espace sans contraintes. D’une fantaisie médiatique dont l’archéologie s’avère surprenante.

Dans « drones d’idées », il y a idées : ce que l’esprit conçoit ou peut concevoir, à la fois sur ces drôles de machines qui arpentent désormais les ciels, envahissent nos écrans et se faufilent même dans l’espace respectable des musées, mais sur bien d’autres choses encore. Car ce blog n’est pas un blog sur les drones. Dans les mois à venir, le blog du Jeu de Paume deviendra un journal de travail, un lieu de partage et (je l’espère) de discussion sur les thèmes et les questions qui occupent en ce moment celle qui vous écrit. Or, les drones ne sont, pour l’instant, qu’une parenthèse bourdonnante au sein d’un chantier plus vaste, portant sur ce que j’appelle volontiers l’animisme des images et de quelques autres êtres techniques. Des êtres, comme les caméras, qui parfois se couplent (mais ceci est une coïncidence bienheureuse) avec les drones (drones et animisme n’allant pas nécessairement ensemble). L’animisme – ou l’imputation à des non-humains d’une puissance d’action, d’un point de vue et d’une intériorité comme « la nôtre » -, voici une drôle d’idée pour quelques têtes encore « modernes ». Voici une (drôle d’) idée qui me hante depuis bien longtemps – sans doute parce que je n’ai jamais été vraiment moderne ?

Voilà donc la feuille de route nécessairement approximative pour ce journal de travail, en sachant que tout cheminement est fait de détours et de sentiers qui bifurquent, de rencontres et de dialogues, de pauses et de (re-)mises en mouvement. Et en rappelant, enfin, que tout blog se fonde sur une parole personnelle et située.

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