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Dune mobile de Raoul Hausmann


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Raoul Hausmann, Dune mobile, septembre 1931 © Adagp, Paris 2021



Raoul Hausmann, lors de ses séjours au bord de la mer, sur l’île de Sylt ou sur la Baltique, est fasciné par les dunes qui s’étendent à perte de vue. Ses photographies donnent à voir un paysage lunaire, intemporel, insituable et immaîtrisable. Il oppose cette indétermination et l’espace de liberté qu’il offre à l’image d’un paysage figé ou idéalisé. La dune est une forme en constant mouvement, qui se déplace et se remodèle sans cesse. Les lignes et les courbes des dunes que photographie Raoul Hausmann sont le signe de leur mobilité, les ondes qui se dessinent à la surface du sable, la trace de l’énergie qui les anime. Il semble ici opposer la clarté et le mouvement du sable aux masses sombres des buissons. Raoul Hausmann photographie alors un phénomène bien connu : la disparition des dunes, leur recul vers les terres et l’avancée des arbres vers la mer. Il enregistre le combat métaphorique de deux armées enchevêtrées : celui des dunes et des arbres, celui du mouvement, de l’énergie et de la vie contre l’enracinement et la persistance. Il semble alors traduire visuellement les propos de Bergson dans L’Evolution créatrice : « Il n’y a pas de forme, puisque la forme est de l’immobile et que la réalité est mouvement. Ce qui est réel c’est le changement continuel de la forme : la forme n’est qu’un instantané pris sur une transition ». Dialectique encore une fois, du fixe et du mouvant, qui réunit ici les grains de sable et les sels d’argent et donne une forme poétique au contexte politique de l’époque.



Ève Lepaon