— Entretien
Les Confettis atomiques
de Marie Losier


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Dans le cadre de sa rétrospective Confettis atomiques ! au Jeu de Paume, rencontre avec Marie Losier dans son atelier, Villa Belleville à Paris. L’artiste travaille à une nouvelle série de monotypes, crée des « boîtes à images » évoquant les lanternes magiques, et prépare des projets d’exposition et de films dont une comédie musicale, dans le prolongement de ses portraits.





Traversés de chorégraphies joyeuses, acrobatiques et parfois burlesques, les films de Marie Losier se déploient depuis près d’une vingtaine d’années autour de « personnages » qui sont aussi ses amis, luchadores et luchadoras ou représentants de l’avant-garde et de l’underground artistiques (les frères Mike et George Kuchar, les compositeurs Tony Conrad et Felix Kubin…). Entre la liberté d’un Jonas Mekas et l’esthétique camp d’un Jack Smith, son cinéma nourri de ses années new-yorkaises et rythmé d’échappées oniriques tient à distance les conventions du documentaire : surimpressions du visage de Cassandro l’« exotico » avec des images de feux d’artifice, visions psychédéliques d’oiseaux naturalisés dans L’Oiseau de la nuit, séquence d’opération surréaliste dans Felix in Wonderland !… Marie Losier nous invite à une célébration des corps, travestis, déguisés, souvent rebelles, comme autant de figures possibles d’un jeu à être autre, court-circuitant les assignations aux rôles sociaux et aux stéréotypes de genre. Comme les personnages, objets de greffes et d’ornements (masques, costumes, trucages), les films sont régis par une logique de collage ; ce sont des jeux de montage auxquels font écho les monotypes de grand format que l’artiste réalise sur du papier de riz, représentant ses amis mais aussi des caméras mutantes. Chaque film raconte des fragments de vie tour à tour légers et graves, hymnes sans étendard aux artistes et à la création. Le sensualisme des couleurs et la musicalité du montage en assoient la valeur poétique, laissant affleurer une grâce logée quelque part entre mélancolie, étonnement et malice.

Alice Laguarda

Alice Laguarda est auteure et critique (art, cinéma, architecture), chercheuse et professeure d’esthétique à l’Esam Caen/Cherbourg. Prochain ouvrage à paraître en 2020 : L’Ultima maniera. Le Giallo, un cinéma des passions, éditions Rouge profond.





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