— Portfolio
“Lisière“ d’Anne-Lise Broyer


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« Jacques, avez-vous déjà vu un
daguerréotype ? C’est à la fois un négatif, un
positif, et un miroir. On voit en même temps
et le support, et l’image, et soi-même ; l’objet
le plus étrange au monde, en somme. »
Alix Cléo Roubaud

Dans la lumière de fin de journée une photographie est posée sur un chevalet au milieu de la grande table en bois. Anne-Lise Broyer travaille, concentrée et silencieuse, crayon et gomme à la main. Avec un infini soin elle trace des sillons noirs puis les estompent pour faire frémir un bosquet de feuilles au premier plan de son image. Voir Anne-Lise Broyer dans ce temps secret de la création est une chance parce que ses photographies ne sont pas une simple surface mais un pli qu’il faut ouvrir pour que s’y dévoilent Marguerite Duras, Georges Bataille, Bernard Noël ou Pierre Michon qui innervent ses recherches, le corps rendu à son animalité primaire dans le temps de la prise de vue ; parce que des heures de dessin minutieuses jusqu’à l’égarement font vibrer le monde enregistré sur la pellicule.

Anne-Lise Broyer évolue sur une ligne de crête, habite une lisière ; celle de l’heure bleue où le jour se coagule lentement à la nuit, celle de la blancheur où la photographie est poussée jusqu’au bord de sa disparition. Dans le moment de la chambre noire, avec son tireur, elle choisit de ne révéler que certains endroits de son négatif, de pousser la photographie dans ses gris. Elle se donne un squelette d’image qui émerge de la blancheur froide du papier photogénique. Ensuite, elle dessine, prolonge et module le réel à la mine graphite qu’elle mêle à la gélatine. En passant devant ses œuvres, la lumière réfléchie sur les brillances perturbe notre regard : elle anime les reliefs, rend la matière vivante, inverse les valeurs, ravivant une mémoire primitive de la photographie où chaque image était à la fois « négatif, positif et miroir ».

Du grain, des gris : Anne-Lise Broyer cherche une photographie dénuée de la grandiloquence des effets, comme une écriture blanche ; simple mais acérée. Au spectateur de déployer ce territoire poétique ; à lui de révéler l’image latente.

Hélène Giannecchini, 2015







Née en 1975, Anne-Lise Broyer passe son enfance et son adolescence dans la région de Mâcon. Elle intègre ensuite l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris puis l’Atelier National de Recherches Typographiques. Ses ouvrages sont publiés aux éditions Filigranes, aux éditions Nonpareilles et aux éditions Verdier. Elle expose régulièrement en France et à l’Étranger. Son travail est représenté par La Galerie Particulière à Paris et à Bruxelles.

Actualités :

Documents 1929-2015, à l’URDLA (Villeurbanne), en Focus du programme Résonance de la Biennale de Lyon, commissariat Léa Bismuth, avec la collaboration de Cyrille Noirjean. Exposition collective. Du 05 septembre au 14 novembre 2015.
Being Beauteous, exposition collective avec Anne-Lise Broyer, Nicolas Comment, Amaury da Cuhna et Marie Maurel de Maillé, à l’abbaye de Saint-Florent-Le-Viel, du 02 octobre au 5 novembre 2015, puis au Musée de La Roche-sur-Yon du 28 novembre 2015 à février 2016.
Les Fragments de l’amour, à CAC La Traverse, Centre d’art contemporain d’Alfortville, commissariat Léa Bismuth. Exposition collective. Du 08 décembre au 12 mars 2016.
Regards de l’égaré, exposition personnelle à La Galerie Particulière, Paris, printemps 2016.



Site de l’artiste
Exposition Documents 1929 – 2015 / URDLA