Je n’approuve pas la façon dont le pouvoir s’exerce au Mexique, pour autant, je ne cherche pas sa chute, je participe au consensus.
Cuauhtémoc Medina. Abuso Mutuo, p. 38.
L’art a, entre autres, des conséquences politiques, car les acteurs culturels, au même titre que les médias, participent consciemment ou inconsciemment aux systèmes et aux représentations qui fabriquent les hégémonies.
Cuauhtémoc Medina. Abuso Mutuo, p. 446.
Cuauhtémoc Medina est un critique d’art et un commissaire d’exposition réputé au Mexique. Dans son livre Abuso mutuo, il dresse un panorama de la production artistique au Mexique des années 1990 jusqu’à 2013. Les textes – sélectionnés par Daniel Montero et Edgar Hernández – dont certains sont inédits, ont été écrits à l’occasion de conférences sur le commissariat d’exposition, de monographies d’artistes ou d’essais. Il y exprime sa position et prend part aux débats nationaux et internationaux. Couvrant une trentaine d’années, Abuso Mutuo1Cuauhtémoc Medina. Abuso Mutuo: Ensayos e intervenciones sobre arte postmexicano (1992-2013). Textes rassemblés par Edgar Alejandro Hernández et Daniel Montero. Mexico : Cubo Blanco, 2017. NDT : les extraits cités ont été traduits directement de l’espagnol (Mexique) pour les besoins de cet article. Le titre pourrait être traduit par « abus consensuel » Abrégé en AM pour les références entre parenthèses. présente la vision qui a sous-tendu la construction d’un monopole de production de l’art contemporain (celui de Cuauhtémoc Medina en l’occurrence) pendant la phase de modernisation néolibérale au Mexique, en concomitance avec la mondialisation et une soi-disant transition nationale vers la démocratie, mais aussi avec une guerre civile qui fait toujours rage. Le livre présente aussi les discours, les politiques et les luttes symboliques de l’époque. Le thème principal — qui donne son titre à l’ouvrage — est la généralisation de relations abusives dans le milieu de la production culturelle. Au plus fort de la période marquée par « La Fin de l’histoire » et par la victoire indéniable de l’impérialisme et du capitalisme absolutiste, l’abus de confiance mutuel devient un modèle relationnel entre le centre et la périphérie (c’est-à-dire entre Klaus Biesenbach et les artistes mexicains), entre les producteurs d’évènements culturels et les institutions (via la critique institutionnelle), entre les artistes et les sujets de représentation (Santiago Sierra ou Yóshua Okón). En affirmant que le secteur culturel est principalement régi par ce genre de relations abusives, l’engagement esthétique et l’indépendance de l’art laissent place au cynisme. On verse alors du mauvais côté de l’histoire : dans les pays les plus développés, le messianisme révolutionnaire s’efface au profit de la mélancolie, et dans les pays sous-développés, l’expérience culturelle prend le goût d’une vaste escroquerie que tout le monde cautionne. Cette notion d’abus consensuel permet également de mettre en lumière les nouvelles formes de dominations politiques et/ou symboliques engendrées par la mondialisation néolibérale et par le nouvel équilibre géopolitique.
Selon le récit de Cuauhtémoc Medina, l’art contemporain fait ses débuts au Mexique avec la légitimation tardive de l’installation comme medium de production artistique à part entière. Ce retard de la part des musées officiels s’expliquerait par la différence perceptible des rythmes de modernisation2Cette thèse a récemment été remise en question par un travail (bourse d’étude) sur l’œuvre de Juan José Gurrola, pionnier au Mexique de Fluxus, de la performance, du féminisme, des assemblages et des installations.. Selon lui, le Mexique se caractérisait par une « arriération culturelle », raison pour laquelle la peinture aurait prédominé par rapport aux performances et aux installations dans les années 1970 et 1980. Cette situation s’expliquait notamment par le mauvais goût officiel et l’absence totale de vision de la part des bureaucrates de la culture. L’État était bien incapable d’acheter des œuvres, de former des publics ou de construire des universités. Il était plus occupé à faire la promotion d’une « haute culture minoritaire » (AM, p. 60) (ou d’artistes déjà célèbres), car les bureaucrates pouvaient facilement en retirer une valeur symbolique. Au début des années 1990, pour contrecarrer cette situation, Cuauhtémoc Medina esquisse un programme de production culturelle dans une « proposition spontanée » signée par plusieurs personnes et adressée à Cuauhtémoc Cárdenas, candidat de la gauche aux élections présidentielles de 1994. Dans cette lettre, le musée « idéal » est présenté comme un lieu autonome, indépendant de la culture officielle, et dont les objectifs seraient les suivants : construire une collection d’art — un modèle en matière d’art mexicain, d’art postmoderne et d’art « post-mexicain » — ; professionnaliser la recherche et le commissariat d’art ; posséder ses propres lieux de stockage et tous les équipements nécessaires à la tenue d’expositions permanentes et publiques (AM, p. 70). Ce lieu viserait aussi à démocratiser l’art et à sensibiliser différents publics. On sait maintenant que ce programme s’est concrétisé bien plus tard, en 2008, avec la création du Musée universitaire d’art contemporain (Museo Universitario Arte Contemporáneo, MUAC) au sein de l’université nationale autonome du Mexique (Universidad Nacional Autónoma de México, UNAM), et sous la houlette de Cuauhtémoc Medina, commissaire principal de l’institution. Le MUAC incarne donc sa vision de la politique culturelle, qui part du principe que « l’État crée les conditions nécessaires qui permettent à la culture d’inventer ses propres moyens d’existence sociale et ses propres lieux de développement » (AM, p. 60). Cette politique était donc vouée à ouvrir des lieux pour que les artistes et les universitaires luttent ensemble pour la démocratie au Mexique, en partant du constat qu’il fallait démanteler la logique de haute-culture officielle de l’État mexicain. C’est ainsi qu’au Mexique, l’art contemporain est devenu un secteur soi-disant autonome, fondé sur une « éthique de l’indépendance » toujours « en opposition » par rapport à l’État.
Au Mexique, l’intérêt politique pour la culture remonte au mouvement étudiant de 1968. L’écrivain Carlos Monsiváis raconte qu’avant cette date, le pouvoir était autoritaire et que le pays était en apparence homogène, avec une seule religion et un parti unique. Le mouvement étudiant de 68 fut à l’origine de luttes pour la diversité culturelle et contre le mensonge idéologique, faisant de la culture un espace d’exception pour la dissidence. De fait, l’exposition conçue par Cuauhtémoc Medina et Olivier Debroise « La era de la discrepancia: Arte y cultura visual en México – 1968-1997 » (2007)3NDT : que l’on peut traduire par « l’ère de la dissension : l’art et la culture visuelle au Mexique (1968-1997) »., fait remonter l’origine de l’institutionnalisation de l’art dissident à une phrase prononcée en 1968 par Javier Barros Sierra, recteur de l’UNAM au moment du conflit entre les étudiants et le gouvernement : « vive la dissension, c’est le meilleur [outil] pour servir [le peuple] ». Le modèle indépendant de gestion culturelle proposé par Medina, quant à lui, s’inscrit dans la suite logique des organisations autonomes créées par la nouvelle société civile qui s’est constituée en réaction à l’absence de l’État après le séisme de 1985 à Mexico.
Pour Carlos Monsiváis, l’image d’un gouvernement inefficace et de politiciens qui ne servaient que leurs intérêts a donné naissance à une société plurielle, qui rejetait le régime corrompu et qui s’est mise à se prendre en charge elle-même 4Carlos Monsiváis. No sin nosotros: Los días del terremoto 1985-2005. Mexico : Era, 2005. Le rôle des institutions culturelles comme lieux de résistance face au mauvais goût et à la corruption s’est alors renforcé. Cette mauvaise réputation de l’État a ensuite ouvert la voie à des partenariats publics-privés de mécénat, et à un modèle d’indépendance culturelle financé par les entreprises et le marché de l’art. C’est à ce moment-là que l’abus de confiance est devenu une forme de relation récurrente entre les institutions (financées à la fois par le secteur privé et par les impôts) et les producteurs culturels. Alors que ces derniers, par dissidence, refusaient d’être récupérés par les institutions pour produire un discours officiel, celles-ci font désormais appel à eux au nom du bien commun. Ainsi, en leur laissant exercer leur liberté d’expression, les institutions prouvent la bonne santé démocratique du pays. Daniel Toriz va jusqu’à affirmer que ces relations abusives ont été sciemment acceptées par les producteurs culturels, « en toute connaissance de cause »5Daniel Toriz. Destacado: « Abuso mutuo » de Cuauhtémoc Medina (Delito de estupro), 17 octobre 2017. Disponible sur : http://www.revistacodigo.com/destacado-abuso-mutuo-de-cuauhtemoc-medina/. À ses yeux, Cuauhtémoc Medina et le secteur de l’art contemporain sont même les héritiés de l’élite littéraire et contre-culturelle du Mexique, étant devenus les détenteurs des « fonctions propres à l’exercice intellectuel »6Ibid.
Dans ce contexte, Cuauhtémoc Medina explique une des tensions sous-jacentes de la production culturelle des années 1990. Alors que les politiques de libéralisation du marché semblaient sur le point de détruire la nation 7Note de l’auteure : l’État providence mexicain a effectivement été démantelé, tandis que des ministères comme celui des finances ou de l’armée ont été renforcés, accompagné par un nouveau gouvernement néolibéral favorable à la circulation légale et illégale des marchandises, des capitaux et des personnes – Voir mon livre : La tiranía del sentido común: la reconversión neoliberal de México. Mexique : Paradiso, 2016., l’État a tout de même mis en place un système de bourses et de dotations pour subventionner la production symbolique du pays, mais le but était en réalité de transformer la nation en une marchandise culturelle8Cuauhtémoc Medina dans une interview pour L’Officiel Mexique. Disponible (en espagnol) sur https://www.lofficielmexico.com/arte-y-cultura/libro-abuso-mutuo-de-cuauhtemoc-medina. Ce programme a été perçu comme une forme brutale de manipulation sociale, à laquelle les artistes ont refusé de collaborer. Ceci explique plusieurs choses. Premièrement, les artistes ont refusé de définir une « mexicanité » et de contribuer à la politique culturelle officielle. Deuxièmement, ils ont opté pour une position dissidente face aux politiques identitaires du multiculturalisme anglo-saxon, en refusant d’être définis comme « Mexicains ». Et troisièmement, ils ont créé des institutions indépendantes, contrepoids de la production symbolique financée par le gouvernement de Carlos Salinas de Gortari. De cette façon, la politisation de l’art a impliqué une déconstruction du discours sur la nation et l’identité. Il fallait aussi devenir « post-Mexicain », c’est-à-dire cesser de s’identifier comme des « artistes de la périphérie », en détournant et en parodiant ce statut hérité de la géopolitique coloniale. Pour ce faire, les artistes et les acteurs culturels ont cherché à renégocier le contrôle symbolique du « centre » comme référence de l’histoire de l’art et de la production artistique (AM, p. 268). Ainsi, pour Medina, à l’aube de la mondialisation, les artistes n’ont pas tenté de rejoindre le mainstream européen ou anglo-saxon en tant qu’acteurs « périphériques » (ou subalternes). Au contraire, ils ont entrepris une transformation de leurs pratiques pour se redéfinir eux-mêmes, échappant aux pièges symboliques du statut d’« autre » imposé par la colonisation et la métropole. C’est ainsi que Medina conçoit ces relations abusives comme étant une des fonctions politiques de l’art. Certaines pratiques artistiques périphériques violent ainsi intérêt qu’elles suscitent dans certains centres géographiques culturels en abusant avec outrance du bon goût, du patrimonialisme et de l’orthodoxie culturelle de ces vieux centres (AM, p. 268). À l’aube de la mondialisation, ces abus de confiance entraînent également une reconfiguration des rapports de légitimation des positions discursives entre le centre et la périphérie, en instaurant une dichotomie entre le « moderne » et le « modernisé ».
Cette dichotomie vient de la notion occidentale d’universalisme, qui inclue un « Autre » abstrait, dont la fonction est d’occuper une place vide où, pour paraphraser Lacan, « il y a de l’Autre ». Nous nous approchons de cet « Autre » grâce à un jeu symbolique de différences (présence et absence, distance et proximité), et à travers une série d’opérations qui consiste à rendre visible le dicible et dicible le visible à propos de cet « Autre ». Tout au long du XXe siècle, les principaux discours sur l’altérité occidentale furent les suivants. Premièrement : l’anthropologie, liée à la production des savoirs, considère l’« autre » comme objet de savoir. Deuxièmement : le militantisme, qui considère l’autre comme un agent révolutionnaire et messianique. Et troisièmement : l’autre à la recherche de reconnaissance, capable d’exprimer ses demandes dans les termes du colonisateur, parfois transfiguré en « victime » qui réclame la restitution de ses droits humains. Cependant, au Mexique — on pourrait même dire en Amérique latine, étant donné l’héritage colonial —, la place occupée par cet « Autre » à l’occidentale est fluctuante, ambiguë, à la fois intérieure et extérieure. C’est le Préhispanique inhérent au passé national. Ce sont les paysans révolutionnaires (aujourd’hui transformés grâce à des formes néolibérales de violence en figures menaçantes comme le narcotrafiquant, le tueur à gages ou le kidnappeur). Ce sont les peuples autochtones constamment soumis aux politiques et aux programmes gouvernementaux visant à les incorporer dans le projet moderne de la Nation mexicaine. C’est ce que Medina appelle « le modernisé », quand Roger Bartra emploie lui le terme « axolotl », sorte de salamandre mexicaine qui ne vit qu’à l’état larvaire qui reflète l’état supposé de sous-développement perpétuel des Mexicains. En général, ce type de discours décrit « le modernisé » et « l’axolotl » comme étant toujours en retard par rapport à la modernité. Ce que Bartra appelle la « desmodernidad9BARTRA Roger. La jaula de la melancolía. Mexique : Grijalbo, 1987. NDT : que l’on pourrait traduire par « démodernité », caractère de ce qui est démodernisé ou mal modernisé.» : un état de chaos représentatif de l’adaptation mexicaine à la modernité, « incomplète », « mal faite », « avec des matériaux pauvres et précaires », « arriérée ». Pour Medina, l’art contemporain des années 1990 reflète cette desmodernidad. Le « modernisé » est son agent, il approche la modernité en « mettant de côté le dilemme entre le moderne et le postmoderne pour favoriser le développement d’une nouvelle sensibilité qui prouve son raffinement en tant que moderne, tout en faisant preuve de soupçons face à l’économie inégalitaire et aux relations culturelles en dialogue avec les langages de l’art contemporain mondialisé » (AM, p. 273).
La critique de l’art que fait le « modernisé » consiste ainsi à qualifier la nation et l’identité d’« idéologies » et de les déconstruire, pour les matérialiser à travers des installations, un langage néo-conceptuel (Francis Alÿs), ou un anticapitalisme de la périphérie (Minerva Cuevas). Dans le livre de Medina, Rubén Ortiz Torres incarne la figure du « modernisé », « confronté au capitalisme tardif comme si c’était l’apocalypse » (AM, p 184). Pablo Vargas Lugo, Sofía Taboas ou encore Eduardo Abaroa pourraient être cités comme autres artistes représentatifs de cette sensibilité. Dans l’iconographie de l’artiste modernisé, la mondialisation est vue comme une contradiction : c’est une modernité qui a échoué, et en même temps, c’est la période la plus cosmopolite qui ait existé. La subjectivité des « modernisés » s’appuie principalement sur l’oblitération des hiérarchies de genres, de « races » ou de classes qui constituent la société mexicaine. Le modernisé est incarné par « l’homme cosmopolite de classe moyenne » ou par le « jeune prodige mâle »10Voir l’entretien de Cuauhtémoc Medina et Yoshua Okón dans : Yoshua Okón, catalogue d’exposition. Mexico : UNAM, 2017.. En ce sens, le modernisé n’est pas une victime ou un être subalterne, c’est un agent symbolique qui enregistre les changements historiques avec une grande sophistication esthétique, tout en contemplant avec mélancolie et cynisme les ruines de la modernisation. Pour Medina, une autre dimension « du politique » dans l’art du modernisé s’exprime dans le besoin de fissurer, de casser ou de démanteler les règles de la modernisation en intervenant dans la réalité sociale pour révéler les tensions générées par les inégalités et exacerbées par la libéralisation du marché. Pour résumer, l’art « post-mexicain » s’oppose aux canons de la modernité (européenne et anglo-saxonne) grâce à des matériaux du « tiers-monde ». Ces matériaux, présents dans monde populaire, urbain et semi-développé, ouvrent une nouvelle voie dans la production culturelle pour attaquer la transformation néolibérale de l’héritage culturel mexicain en Disneyland des tropiques (AM, p. 85). En d’autres termes, les artistes « post-mexicains » ont produit un système iconographique qui rend compte des nouvelles réalités créées par le néolibéralisme en les « perforant » pour les reconfigurer symboliquement. Ils se sont surtout construits en parallèle et en opposition à une image officielle du Mexique fondée sur une spécificité culturelle, dont le but était de devenir un produit d’exportation pour légitimer les politiques néolibérales.
Cuauhtémoc Medina fait remonter l’apparition de nouvelles formes de « politisation » dans l’art et dans les sensibilités esthétiques à l’an 2000. Celles-ci surviennent en réaction à un monde administré par une élite répressive, et à une politique manipulée par les lobbies et par la gestion des antagonismes. Línea tatuada (Ligne tatouée) de Santiago Sierra (1999) en est un bon exemple, car pour Medina, cette œuvre « propose la participation passive à la violence et à la contemplation mercenaire de notre soumission à un destin économique » (AM, p. 199). C’est à cette époque que les relations abusives et les représentations qu’elles entraînent se généralisent entre les gens, reflet inévitable du caractère absolutiste que prend le capitalisme. Pour Medina, Las reglas del juego (Les règles du jeu) de Gustavo Artigas (2000-2001) est une autre œuvre emblématique de l’art politisé des années 2000. Il s’agit d’une partie de football entre deux équipes mexicaines et d’une partie de basket entre deux équipes de San Diego toutes deux jouées simultanément sur le même terrain d’un gymnase de Tijuana. La performance représente une certaine forme de coexistence sans interférences. C’est une analogie du modèle antagonique des démocraties néolibérales, « généré par le choc entre l’universalité des relations mercantiles, de la pseudo-démocratie, et d’une société éreintée par des différences culturelles et sociales inconciliables, soumise à une économie à plusieurs vitesses et luttant contre l’homogénéisation de la mondialisation » (AM, 232). Pour Medina, la performance de Gustavo Artigas est aussi évocatrice de ce problème politique fondamental généré par la mondialisation qu’est la standardisation de la planète.
À cette période, la notion d’autonomie de l’art fondée sur une relation éthique au sujet de la représentation est considérée comme obsolète. Simultanément, la critique artistique s’impose pour devenir une pratique politique d’ampleur mondiale. Avec cynisme et mélancolie, la critique sociale et la lutte des classes sont écartées. Dans le domaine du sensible, les pratiques politiques ont fait de l’abus de confiance un instrument de médiation au sein de la représentation, et elles ont déployé des stratégies d’« interférence sociale » et d’« intervention in situ ». Cuauhtémoc Medina qualifie cette forme de politisation de « baroque social », qu’il définit comme « une forme de pratique sensible politisée reposant sur la situation […] qui ouvre des possibilités critico-cyniques en échange d’une position ambivalente face au processus violent d’intégration [mondiale] » (AM, p. 276). D’une certaine manière, la politisation de l’art se traduit par la mise en place de systèmes d’enfermement d’un contexte avec lequel on ne s’identifie plus, mais qui est tout de même accompagné d’une description détaillée de ce qui a été capturé. En d’autres termes, le « baroque social » devient une sorte de piège cynique, ambivalent et poétique. Dans un article pour le journal Reforma du 8 décembre 2010, Cuauhtémoc Medina décrit la « justesse politique » des œuvres de Francis Alÿs ou de Mario García Torres, qu’il qualifie de « poétique-politique ». Selon lui, « les opérations politisées » de ces artistes cherchent à « réintroduire des interventions capables de sauver des opérations politiques opposées à l’espace indistinct du politique ». Lorsqu’il parle d’« opérations politiques », par opposition au « politique commun », Medina fait vaguement référence à la distinction que faisait le philosophe Claude Lefort entre la politique pratique et la théorie politique, entre la politique libérale et la politique démocratique radicale. Selon la philosophie libérale, la politique appartient aux biens communs et il est nécessaire pour la bonne constitution d’une communauté. Du point de vue de la politique démocratique radicale, la politique est une question de pouvoir, de compétition pour gouverner et pour accéder aux ressources. En revanche, le politique est un régime symbolique, c’est la forme dans laquelle la société se représente elle-même dans sa totalité, en tant qu’unité et collectivité. Le politique est la mise en scène de la représentation de soi-même, c’est l’interprétation de la production et de la reproduction des relations dans une société. Dans un régime totalitaire, le politique est la fusion du pouvoir avec le social, c’est-à-dire que la société et le peuple occupent le pouvoir par l’entremise d’une unité symbolique qui efface les signes de division de la société. Mais comme il est impossible d’éradiquer ces divisions, le politique dans les régimes démocratiques doit reproduire l’espace public à travers le conflit. Le problème étant que « le peuple » est toujours divisé et pluriel, l’unité ne peut donc être réalisée que par la violence et la répression, c’est-à-dire en abolissant la politique en tant que praxis. De cette manière, la démocratie considère que le conflit et la dissidence sont des composantes nécessaires pour maintenir son caractère ouvert. Pour qu’une société soit démocratique, c’est-à-dire une société où le pouvoir, la légitimité, l’identité et l’unité peuvent être remis en question, le lieu symbolique du pouvoir doit être laissé vide. La démocratie peut toutefois devenir dangereuse quand certaines organisations du pouvoir sont institutionnalisées ou figées, amenant une domestication de « la politique comme conflit », ce qui la rend incapable de remettre en cause les limites du pouvoir et de renouveler la « politique en tant que régime ».
Il faut savoir qu’au Mexique, les années 2000 ont été marquées par l’arrivée au pouvoir du Parti action nationale (le PAN, Partido Acción Nacional, conservateur). C’est une période de « transition démocratique » qui voit l’industrie culturelle internationale s’installer dans le pays grâce aux nouveaux schémas de financement publics-privés. C’est aussi le moment où les dichotomies centre/périphérie, Nord/Sud, Orient/Occident, monde développé/tiers-monde deviennent obsolètes. Le Mexique connaît également une vague de violence en raison de la militarisation de la lutte contre le trafic de drogue lancée par le président Felipe Calderón. À Mexico, c’est le triomphe de la modernité. La ville devient une enclave du raffinement culturel et un centre important dans le réseau international de production et de distribution de l’art contemporain. Les artistes « modernisés », habités par le désir d’accéder au monde développé en tant qu’expérience concrète et visible, voient disparaître leur fantasme d’une ville en ruine, du déchirement du tissu social et du retard culturel perpétuel.
Selon la philosophie libérale, c’est à ce moment-là que les antagonismes sont institutionnalisés, avec la création d’institutions comme le MUAC, dont la fonction est d’interroger, de diagnostiquer, d’archiver l’information, de créer de nouvelles cartographies du tissu social, ou encore de dénoncer le non-respect des droits humains. Autrement dit, l’art contemporain (et la production culturelle en général) a contribué à la gestion des antagonismes inhérents au politique. Il a ainsi eu pour fonction de produire un consensus capable de coexister avec un nouveau régime moral de scandale permanent qui empêche une réelle mobilisation politique. Par conséquent, l’appel de Cuauhtémoc Medina pour un art qui cherche à « réintroduire des interventions capables de sauver des opérations politiques opposées à l’espace indistinct du politique » est un vague héritage de la « révolution institutionnelle ». Un concept défendu par le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, pour Partido Revolucionario Institucional, resté au pouvoir pendant 70 ans), intrinsèque à l’autoritarisme mexicain, et qui occupe désormais la place de la « dissidence », propageant l’indignation garante des démocraties néolibérales. La mélancolie, l’injonction morale à produire des antagonismes, la critique et la contre-information sont devenues le phallus, elles ont été instaurées en atavismes néocoloniaux dans le régime sensible de l’absolutisme capitaliste, imprégné de cynisme, et incapable de concevoir des alternatives hors du système capitaliste et de la modernité.
La mélancolie comme unique voie de politisation de l’art est symptomatique de l’oubli de la tradition révolutionnaire de la modernité, qui n’est rien d’autre que le droit de se rebeller contre les structures du pouvoir. Pour suivre le propos d’Ewa Plonowska Ziarek, une des contradictions essentielles de la modernité réside justement dans la dichotomie entre révolution et mélancolie11Ewa Plonowska Ziarek. Feminist Aesthetics and the Politics of Modernism. New York : Columbia University Press, 2012.. Car aucune des deux n’est exempte de problèmes. La tradition révolutionnaire de la modernité ne parvient pas à prendre en compte les pertes et les dominations qui persistent malgré les luttes d’émancipation. La mélancolie, quant à elle, est une impasse dans la praxis révolutionnaire, car c’est justement une destruction de la grammaire et de la syntaxe de la praxis. Le désir impatient de politiser l’art et de l’intégrer dans un contexte social et mondial plus large, tout en ignorant pourtant les dominations qui perdurent, montre l’échec du politique, l’aveuglement devant l’urgence des luttes de libération, et l’incapacité à imaginer une forme d’altérité subversive. Traditionnellement, au XXe siècle, les paysans mexicains étaient vus comme les hérauts de la révolution. À l’aube du XXIe siècle, pour Cuauhtémoc Medina, c’est l’œuvre Tinieblas, d’Edgardo Aragón, qui incarne la sensibilité du « nouveau Sud ». Cette installation exposée au MUAC à l’occasion de la série d’expositions intitulée Por amor a la disidencia (par amour de la dissidence) montre 13 musiciens juchés sur des monuments qui marquent une frontière, filmés par l’artiste et chacun représenté sur un écran séparé. Ensemble, ils interprètent Tinieblas (brouillard), une chanson guatémaltèque populaire dans le sud-est du Mexique. Pour l’artiste, l’œuvre est une métaphore des luttes territoriales entre différentes communautés, une réflexion sur les conflits de cette région du pays. Pour Médina, Egardo Aragón parle « du destin des paysans latino-américains d’une manière joliment sèche et mythopoétique » (AM, p. 436). Il insiste sur la sophistication avec laquelle l’artiste représente la tragédie sociale et historique de la transformation des campagnes mexicaines, qui passent d’une utopie révolutionnaire à la dystopie actuelle. Aujourd’hui, pour les paysans, la criminalité est le seul ascenseur social possible, elle donne naissance à une nouvelle culture paysanne dont la violence consumériste est le terreau. Le « Sud » décrit par Edgardo Aragón postule avec mélancolie l’absence de sujet révolutionnaire, alors que l’on peut percevoir en arrière-plan que les violences misogynes et les tendances suicidaires sont devenues les seuls moyens d’échapper à la domination sociale. Toujours selon Medina, un autre courant de l’art politisé s’empare de cette violence pour en faire un espace d’expérimentation protéiforme et pour témoigner de la complexité de notre époque (AM, p. 440). L’œuvre de Teresa Margolles en est représentative. Comme Edgardo Aragón, son travail montre une substitution inconsciente de la crise sociale par une souffrance personnelle. Mais cette expression subjective et personnelle de la souffrance n’est rien d’autre qu’un déplacement mélancolique des vraies luttes politiques. On remarquera que les luttes contre des projets pharaoniques d’extraction et de destruction des ressources communes, réprimées par l’armée mexicaine comme par les cartels de la drogue, ne trouvent pas leur place dans ce discours, car ces projets servent la modernisation et le progrès. Dans sa version de la desmodernization mexicaine, Cuauhtémoc Medina exclut également l’œuvre Palas por pistolas (2008) de Pedro Reyes, un projet qui consistait à récupérer les armes détenues par des civils pour les recycler et en faire des pelles pour planter des arbres. L’auteur l’écarte en la taxant de « psychomagique » (selon le terme d’Alejandro Jodorowsky). De même, il rejette le travail fait depuis 2000 par Silvia Gruner au prétexte qu’il traite de problèmes féminins et subjectifs. Medina, myope et misogyne, l’interprète comme relevant « de désirs frustrés ou d’échec d’histoires romantiques », « d’allégories de passions réfrénées », « d’explosions neurotiques personnelles »12Cuauhtémoc Medina. « Natación y evocación. El Ojo Breve », Reforma. 26 novembre 2003..
La figure de l’artiste « modernisé » décrite par Cuauhtémoc Medina est en réalité différente de l’axolotl de Roger Bartra, car elle n’est pas restée au stade larvaire. Il s’agit plutôt d’une personne blessée qui capitule face à la menace d’une mort imminente. Hanté par le refoulement de traumas violents et des conflits qui pèsent sur le monde sociopolitique, le sujet mélancolique canalise ses souffrances dans un sadisme extrême et dans des relations abusives (comme dans les œuvres de Yoshua Okón, par exemple). En résumé, la mélancolie du « modernisé » est symptomatique d’une domination, elle révèle l’impasse esthétique et politique du présent. La réduction de la politique au scandale perpétuel que connaissent les institutions culturelles mexicaines signifie que l’art se dirige vers une mort politique. De plus, le refoulement par la culture hégémonique de la nécessité éthique et politique de « nommer le désastre » est symptomatique de l’incapacité de concevoir que l’exploitation coloniale, son héritage et sa persistance sont un problème politique. L’escroquerie consentie comme vecteur des relations institutionnelles et sociales révèle la réalité abjecte de la société néolibérale. L’absence d’un horizon politique commun explique la prédominance de l’ambivalence poétique et des polémiques sans fin, alimentées par la morale manichéenne du bien et du mal.
Quel rôle occupe aujourd’hui la production culturelle dans cette société abjecte, si ce n’est d’être un miroir cynique qui rappelle sans cesse au public, avec jésuitisme, ses propres péchés ? La clé pour comprendre le rôle de l’art contemporain est peut-être de le concevoir comme un champ d’opérations financé dans des proportions sans précédent, et donc comme un phénomène de pouvoir déterminé par les sphères de production, de distribution et de consommation où règnent le cynisme, les bonnes intentions et la culpabilité libérale. Dans les propos de Cuauhtémoc Medina, l’art contemporain est inséparable d’une supposée pertinence politique. Il est vu comme la source d’une pensée anti-système qui a vaincu la culture officielle du PRI. Et maintenant que le PRI a disparu, l’art contemporain, tant qu’il est de nature dissidente, est un moyen de maintenir la santé démocratique du pays. Cela signifie qu’au Mexique, l’art contemporain marque la fin de la culture nationaliste officielle, et que le MUAC n’est pas vu comme un centre de « dissémination culturelle », mais comme « un des espaces publics de la société à venir » (AM, p. 424). Cette conception du musée comme « place publique » est représentative d’une sensibilité mondialisée, et qui est moquée dans The Square, de Ruben Östlund (2017). Dans ce film, une œuvre d’art — intitulée The Square — est installée devant le musée d’art contemporain de Stockholm. Créée par une artiste argentine et inspirée par l’« esthétique relationnelle » définie par Nicolas Bourriaud, elle instaure une utopie miniature dans un carré de 80 cm de côté. Dans ce carré (analogie humoristique et miniature du white cube des musées et des galeries), l’altruisme et la responsabilité sont la règle, c’est un sanctuaire de confiance et de bienveillance où tout le monde a les mêmes droits et les mêmes devoirs. L’œuvre suscite toute une série de questions : pourquoi un tel espace devrait-il exister ? Pourquoi est-il si petit ? Et comment partager les mêmes droits et devoirs dans une société où le sexisme, le racisme et les inégalités sociales sont la règle ? Dans le film, Christian, le conservateur du musée, fait appel à une équipe de communication pour faire la promotion de The Square. Pour faire parler de l’œuvre sur les réseaux sociaux, les communicants proposent de réaliser une vidéo choquante d’une fille qui explose dans le fameux carré, sans que l’on sache si elle est victime d’une attaque terroriste ou si c’est une kamikaze. Devenue virale, cette vidéo provoque un tel scandale que Christian (qui d’ailleurs signifie « chrétien » en anglais) doit présenter des excuses publiques au nom du musée. À la même période, la perte de son iPhone va l’amener dans un quartier défavorisé de Stockholm où il va passer par des situations de racisme, de rédemption et de vengeance. D’une certaine manière, Christian incarne les contradictions qui habitent les bonnes intentions de la production sensible, car elles sont inconciliables avec les choix qu’il doit faire au quotidien. Une de ces contradictions est évidente dans le film. D’un côté, l’art contemporain mondial dans son ensemble possède la même fonction utopique que l’œuvre The Square, fonction que Cuauhtémoc Medina attribue aussi au MUAC en tant qu’« espace public de la société à venir ». De l’autre, pour garder cette fonction d’espace public, le musée doit être le lieu du scandale perpétuel, imprégné de sadisme et de mélancolie. En réalité, la fonction de l’art contemporain est de divertir l’oligarchie en l’épatant, avec le même sadisme conscient ou inconscient dont cette élite fait preuve lorsqu’elle profite de ses privilèges et qu’elle finance ou achète de l’art contemporain. Dans une scène clé du film, où des célébrités et de riches mécènes assistent à un dîner de gala au musée, Oleg, « artiste de performance », mime le comportement d’un gorille devant un public censé ne pas intervenir. Lors de la performance, le gorille va devenir de plus en plus agressif, effrayant les convives qui tentent de l’ignorer. Soudain, il se jette sur une belle femme et la renverse brutalement de sa chaise pour la violer. Jusqu’à ce moment-là, personne n’avait levé le petit doigt, chacun préservant sa propre vie. La performance d’Oleg met en lumière le darwinisme social qui règne, il montre qu’avant d’être confronté à l’extrême, la règle est celle du chacun pour soi. Agissant finalement par culpabilité (et non par solidarité ou bienveillance, comme Christian lors de la scène de l’iPhone), un des invités se lève pour défendre la femme. Plusieurs personnes le rejoignent finalement pour soumettre « l’étranger » avec qui aucune relation sociale cordiale ne peut être établie. La raison pour laquelle je m’attarde sur ce film, c’est que la société suédoise contemporaine décrite par Ruben Östlund est une illustration, en miniature, du régime sensible mondial dans lequel nous sommes, déchiré par des tensions racistes et sociales que l’art contemporain cherche à apaiser de ses bonnes intentions. L’art contemporain veut être le lieu des antagonismes, des tensions, des oppositions, ainsi qu’un laboratoire pour un futur meilleur. Le réalisateur montre aussi à quel point l’art est un secteur symbolique pour les élites qui le financent. Elles veulent apaiser leur mauvaise conscience tout en étant persuadées d’offrir quelque chose d’« utile » à la société.
Au Mexique, comme je l’ai déjà dit, l’avènement de l’art contemporain a dû aller au-delà de la culture officielle qui produisait une image du pays exclusivement destinée à être consommée par les élites et par un public international. À présent, la culture officielle a cependant adopté une autre forme en occupant un nouveau champ destiné aux masses, à partir des liens entre la politique, les politiciens et les célébrités. La première dame mexicaine, littéralement un personnage de telenovela, en est un bon exemple. On peut aussi évoquer la récente célébration de l’anniversaire de la révolution mexicaine, qui a donné lieu à un concert gratuit de Timbiriche (un groupe pop des années 1980) sur la place de la Constitution. L’évènement était sponsorisé par l’administration « citoyenne » du maire de Mexico, Miguel Ángel Mancera, et s’est accompagné d’effets de lumières aux couleurs nationales et de représentations de personnages historiques. En parallèle, tout un pan de la culture a été récupéré par l’élite branchée, celle qui consomme de l’art contemporain sadique et cynique, et des produits relevant d’une nouvelle « mexicanitude » qu’incarnent la cuisine d’Enrique Olvera, la mode de Carla Fernández, ou encore la vaisselle en étain et les céramiques noires d’Oaxaca vendues dans les magasins de luxe. On pourrait affirmer que l’héritage du sous-développement du Mexique était une modernité légitimée par un joyeux sadisme, conséquence de la normalisation du darwinisme sociale. Les politiques néolibérales n’ont pas créé de Disneyland tropical, mais elles ont produit ce que beaucoup de personnes attendaient de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) : une enclave mexicano-chic dotée d’infrastructures de production et d’expositions d’art dignes du monde développé. Désormais, à Mexico, « nous sommes comme eux » (ou même meilleurs). Mais cette forme de modernité a un coût : l’addiction à l’énergie, à la consommation, à la nouveauté, à la vitesse, à la technologie. En réalité, c’est une sale guerre contre la vie, c’est une nouvelle vague de spoliations et de destructions néocoloniales. Cette modernisation néolibérale nous lègue un art contemporain et des infrastructures culturelles haut de gamme, mais il nous laisse aussi une planète ravagée, une biosphère abîmée, et des peuples entiers qui survivent en se détruisant eux-mêmes. L’art est-il vraiment capable de rejeter la modernité, de changer radicalement les structures du pouvoir et les sociétés qui détruisent l’environnement ? Malheureusement, la défense de la vie et la lutte politique contre les écocides financés par l’État (tacitement acceptés par la majorité des citoyens mexicains) n’ont pour le moment rien à voir avec le cynisme et la mélancolie-chic des white cubes de Mexico.
References
↑1 | Cuauhtémoc Medina. Abuso Mutuo: Ensayos e intervenciones sobre arte postmexicano (1992-2013). Textes rassemblés par Edgar Alejandro Hernández et Daniel Montero. Mexico : Cubo Blanco, 2017. NDT : les extraits cités ont été traduits directement de l’espagnol (Mexique) pour les besoins de cet article. Le titre pourrait être traduit par « abus consensuel » Abrégé en AM pour les références entre parenthèses. |
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↑2 | Cette thèse a récemment été remise en question par un travail (bourse d’étude) sur l’œuvre de Juan José Gurrola, pionnier au Mexique de Fluxus, de la performance, du féminisme, des assemblages et des installations. |
↑3 | NDT : que l’on peut traduire par « l’ère de la dissension : l’art et la culture visuelle au Mexique (1968-1997) ». |
↑4 | Carlos Monsiváis. No sin nosotros: Los días del terremoto 1985-2005. Mexico : Era, 2005 |
↑5 | Daniel Toriz. Destacado: « Abuso mutuo » de Cuauhtémoc Medina (Delito de estupro), 17 octobre 2017. Disponible sur : http://www.revistacodigo.com/destacado-abuso-mutuo-de-cuauhtemoc-medina/ |
↑6 | Ibid |
↑7 | Note de l’auteure : l’État providence mexicain a effectivement été démantelé, tandis que des ministères comme celui des finances ou de l’armée ont été renforcés, accompagné par un nouveau gouvernement néolibéral favorable à la circulation légale et illégale des marchandises, des capitaux et des personnes – Voir mon livre : La tiranía del sentido común: la reconversión neoliberal de México. Mexique : Paradiso, 2016. |
↑8 | Cuauhtémoc Medina dans une interview pour L’Officiel Mexique. Disponible (en espagnol) sur https://www.lofficielmexico.com/arte-y-cultura/libro-abuso-mutuo-de-cuauhtemoc-medina |
↑9 | BARTRA Roger. La jaula de la melancolía. Mexique : Grijalbo, 1987. NDT : que l’on pourrait traduire par « démodernité », caractère de ce qui est démodernisé ou mal modernisé. |
↑10 | Voir l’entretien de Cuauhtémoc Medina et Yoshua Okón dans : Yoshua Okón, catalogue d’exposition. Mexico : UNAM, 2017. |
↑11 | Ewa Plonowska Ziarek. Feminist Aesthetics and the Politics of Modernism. New York : Columbia University Press, 2012. |
↑12 | Cuauhtémoc Medina. « Natación y evocación. El Ojo Breve », Reforma. 26 novembre 2003. |