Cet article offre un compte rendu de l’exposition ‘The End of Money’, qui se tient actuellement au Witte de With à Rotterdam (22 mai – 7 août 2011). Il ne reste plus beaucoup de temps pour aller la visiter, mais elle vaut le détour!
Il s’agit à première vue d’un énorme tas d’herbe coupée, qui s’avère en réalité constitué de tous les billets d’une livre réunis par la Banque Centrale chypriote lors de son passage à l’Euro, des billets réduits en morceaux : telle est l’œuvre de Christodoulos Panayiotou, 2008 (2008), installation imposante et provocante qui ouvre l’exposition.
Dédiée aux relations entre temps et valeur, celle-ci engage une réflexion profonde sur la relativité historique des systèmes d’échange et sur ce que ces programmes peuvent nous apprendre sur le monde d’aujourd’hui.
Cette réflexion est développée avec acuité dans la vidéo de Zachary Formwalt, At Face Value (2008), laquelle utilise des timbres cachetés datant de la période de dépression des années 1920 comme des outils permettant d’exposer visuellement le caractère conventionnel de la valeur symbolique ; elle se retrouve aussi dans Stage Design for Disassociation (2011) de Vishal Jugdeo, une vidéo et une installation sur les formes compulsives d’assimilation dans la société capitaliste tardive.
Un autre moment fort réside dans l’installation de Goldin + Senneby The Discrete Charm (2011) – conçue pour l’occasion – qui aborde de manière critique l’auto-référentialité froide de l’ordre financier actuel conçu en tant que méta-système. On retiendra aussi les œuvres évoquant des atmosphères apocalyptiques, telles que celles de Peter Fischli et David Weiss, Maha Maamoun et Agnieszka Kurant.
Bien que posée comme une hypothèse, la fin absolue de l’argent est rejetée en tant qu’idée utopique par le commissaire invité Juan A. Gaitán. Cependant, l’ambition de la compléter par des systèmes alternatifs qui repensent les prémisses des relations sociales est rafraichissante. Il est dès lors cohérent que le Witte de With accepte comme billet d’entrée les hour-notes [billets horaires] Time/Bank d’e-flux conçus par Lawrence Weiner. Celui-ci est présent dans cette exposition avec une deuxième pièce, le slogan A CHIP TAKEN OFF OF AN OLD BLOCK, qui constitue un acte de résistance linguistique et systémique.
Ce texte est également publié en anglais sur artforum.com