Au fil de l’eau – Drones d’idées http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro par Teresa Castro Thu, 19 Jul 2018 12:43:30 +0000 fr-FR hourly 1 Dernier billet http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/12/02/dernier-billet/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/12/02/dernier-billet/#comments Wed, 02 Dec 2015 14:19:49 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=760 Chères lectrices, chers lecteurs : ce blog se termine aujourd’hui. Un grand merci à vous tous pour l’intérêt que vous avez porté à ces quelques réflexions éparses. J’espère que ces notes, rédigées au fil des semaines et des rencontres, aient …

Lire la suite

L’article Dernier billet est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
Chères lectrices, chers lecteurs : ce blog se termine aujourd’hui. Un grand merci à vous tous pour l’intérêt que vous avez porté à ces quelques réflexions éparses. J’espère que ces notes, rédigées au fil des semaines et des rencontres, aient pu éveiller votre curiosité ou susciter des questionnements. Je voudrais remercier tous les amis et collègues qui ont gentiment accepté de partager avec nous leurs idées et impressions : Daniel Barroca, Zoltán Biedermann, Filipa César, Anaïs Farine, Lúcia Ramos Monteiro, Emmanuel Siety. Merci infiniment à Clara Schulmann, dont le questionnaire sur les « Techniques émotionnelles. Écrire et filmer au féminin » est venu animer et enrichir cet espace. Clara est une complice intellectuelle de longue date, sans laquelle je n’aurais pas osé me lancer dans cette aventure : je souhaite vivement que le travail qu’elle a mené ici ne s’arrête pas avec ce blog. Enfin, je remercie très chaleureusement l’équipe du Jeu de Paume, en particulier Marta Ponsa et Adrien Chevrot. Ça a été à la fois un plaisir et un privilège de travailler avec vous.

Il est impossible, au moment où je vous écris, de ne pas avoir le cœur lourd. Je pense à une phrase de Romain Rolland (rendue célèbre par Gramsci, qu’on a abondamment cité ces derniers jours) :

Il faut lier le pessimisme de l’intelligence à l’optimisme de la volonté.

Posons-nous donc les bonnes questions pour essayer de trouver les réponses justes et continuons, aujourd’hui et toujours, à réfléchir – et à agir – ensemble.

Teresa Castro

L’article Dernier billet est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/12/02/dernier-billet/feed/ 1
Éthique de la guerre, éthique des images – à propos d’Omer Fast http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/17/ethique-de-la-guerre-ethique-des-images-a-propos-domer-fast/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/17/ethique-de-la-guerre-ethique-des-images-a-propos-domer-fast/#comments Tue, 17 Nov 2015 13:49:41 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=709 Samedi matin, nous nous sommes réveillés – si tant est que nous ayons dormi – dans un pays « en guerre », placé en état d’urgence pour trois mois. Mais sommes-nous « en guerre » et qu’est-ce que « la guerre » …

Lire la suite

L’article Éthique de la guerre, éthique des images – à propos d’Omer Fast est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
Samedi matin, nous nous sommes réveillés – si tant est que nous ayons dormi – dans un pays « en guerre », placé en état d’urgence pour trois mois. Mais sommes-nous « en guerre » et qu’est-ce que « la guerre » ? – voici deux questions que nous ne pouvons plus esquiver.

Omer Fast – 5,000 Feet is the Best [Le mieux, c’est 5 000 pieds], 2011, Vidéo numérique, couleur, son, 30 min" © Omer Fast

Omer Fast – 5,000 Feet is the Best [“Le mieux, c’est 5 000 pieds”], 2011. Vidéo numérique, couleur, son, 30 min © Omer Fast

Je n’oserai pas m’avancer dans le domaine de la science politique, mais je sais que la guerre est aussi une question de droit (droit de la guerre et droit dans la guerre) et un problème d’éthique. Il suffit de s’intéresser moyennement à l’actualité internationale pour comprendre que depuis plusieurs années déjà la transformation des conflits militaires bouleverse radicalement l’éthique de la guerre et embarrasse ce qu’on appelle le « droit des conflits armés ». La légalité des frappes françaises en Syrie, par exemple, ne va pas de soi, comme le rappelle ce texte dans The Guardian, d’autant plus que l’ennemi (Daech) n’est pas un état. D’un point de vue juridique, la situation s’avère, elle aussi, très complexe.

Quand on s’intéresse à la question des drones, en particulier militaires, les questions d’éthique de la guerre sont inévitables. Utilisés notamment pour mener des frappes contre des cibles situées dans des pays (le Pakistan, le Yémen) avec lesquels la nation commanditaire (les États-Unis) n’est pas en guerre, les drones militaires (au moins l’utilisation qui en est faite) mettent à mal notre conception classique de la guerre. D’ailleurs, et encore une fois, devrait-on parler de « guerre », ou plutôt comme le suggère Grégoire Chamayou, de « chasse à l’homme » ? Actuellement exposé au Jeu de Paume, l’artiste Omer Fast interroge, dans un film essentiel – 5000 Feet is the Best (2011)-, une autre dimension de ce problème éthique : les conséquences (psychologiques, morales) sur les « pilotes » à distance de ces machines de mort. Fast s’appuie sur une série d’entretiens réalisés avec l’opérateur d’un Predator et son montage subtil et complexe de plusieurs récits est, lui-même, un exercice d’éthique – sur le quoi et comment montrer, sur le quoi et comment raconter – extrêmement réussi.

L’article Éthique de la guerre, éthique des images – à propos d’Omer Fast est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/17/ethique-de-la-guerre-ethique-des-images-a-propos-domer-fast/feed/ 1
Ape Culture http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/05/ape-culture/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/05/ape-culture/#respond Thu, 05 Nov 2015 13:38:41 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=691 Je n’ai pas pu visiter l’exposition Ape Culture qui s’est déroulée jusqu’à juillet dernier à la Haus der Kulturen der Welt à Berlin et dont Anselm Franke et Hilda Peleg étaient les commissaires. J’apprécie beaucoup le travail de Franke, dont …

Lire la suite

L’article Ape Culture est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
{{PD-Art|PD-old-100}}

Gabriel Cornelius von Max (1840-1915), Singes en juges de l’art, 1889. Neue Pinakothek, Munich / Domaine public.

Je n’ai pas pu visiter l’exposition Ape Culture qui s’est déroulée jusqu’à juillet dernier à la Haus der Kulturen der Welt à Berlin et dont Anselm Franke et Hilda Peleg étaient les commissaires. J’apprécie beaucoup le travail de Franke, dont les travaux autour de l’animisme (2012) et des géographies de la coopération depuis 1945 (2013) m’ont énormément intéressée pour des raisons différentes. En guise de consolation, je me suis procurée le catalogue de l’exposition, paru chez Spector Books ; voici donc quelques notes éparses à son propos. Teresa Castro

L’exposition s’intéressait à la figure des simiens ainsi qu’à un ensemble de récits populaires et scientifiques autour des primates pour interroger le partage entre nature et culture et repenser in fine les notions de « social » et de « société ». L’hypothèse de Franke – détaillée dans son texte «  Mirrors at Frontiers » – consiste à prendre le simien comme une sorte de Kippbild, c’est-à-dire une figure ambiguë et réversible capable de révéler ce que nous croyons séparer l’humain de l’animal. Autrement dit, le simien nous permet de comprendre (et ainsi de contourner) les stratégies de ce que Giorgio Agamben nomme la « machine anthropologique » de la pensée et de l’humanisme occidentaux : la fabrication idéologique de cette partition entre l’humain et l’animal que l’on veut irrévocable, mais qui s’avère, en réalité, particulièrement délicate quand il s’agit de séparer l’homme du singe – dont le mimétisme et la sociabilité frappent le plus cartésien des primatologues. Franke s’appuie non seulement sur le travail du philosophe italien, mais aussi sur l’apport d’un ensemble d’anthropologues contemporains – comme Tim Ingold, Eduardo Viveiros de Castro ou Eduardo Kohn – dont les recherches en soi très différentes, inspirées tantôt de la phénoménologie tantôt de la sémiotique, se retrouvent, néanmoins, autour d’un même questionnement des frontières entre l’humain et le non-humain.

 

Dans le contexte que je viens rapidement d’esquisser, la primatologie surgit comme un phénomène discursif important, une sorte de « mythologie » scientifique à laquelle le catalogue (à l’instar de l’exposition) consacre une attention particulière (il inclut, entre autres, un entretien avec le primatologue franco-suisse Christophe Boesch). Il s’agit, d’une part, d’examiner les récits autour des simiens, ainsi que de l’évolution et des origines de l’Homme ; mais aussi d’exposer la façon dont les ressemblances et les différences entre les uns et les autres ont toujours été négociées, aboutissant à la répression systématique de l’animalité et de ce qui lui est associé (le mimétisme, le geste). D’autre part, la primatologie s’avère elle-même un terrain symptomatique, dans la mesure où sa reconnaissance plus ou moins précoce de l’importance de la sociabilité (y compris entre « sujets observateurs » humains et « sujets observés » simiens) semble annoncer la façon dont les rapports entre humains et non-humains sont aujourd’hui en train d’être repensés. En ce sens, l’enquête de Franke et Peleg s’inscrit dans la continuité du travail entamé par Donna Haraway dans son ouvrage Primate Visions : Gender, Race and Nature in the World of Modern Science (1990) – Haraway étant rappelée et commentée à plusieurs reprises.

 

En lisant ce catalogue fort stimulant, je peux difficilement juger de l’efficacité ou non du dispositif expositif qui séparait un ensemble de travaux contemporains (Lene Berg, Marcus Coates, Anja Dornieden & Juan David González Monroy, Ines Doujak, Coco Fusco, Jos de Gruyter and Harald Thys, Pierre Huyghe, Louise Lawler, Damián Ortega, Nagisa Oshima, Erik Steinbrecher, Rosemarie Trockel, Klaus Weber et Frederick Wiseman) d’une section documentaire, pensée comme une « bibliographie annotée » à l’intention du visiteur (et portant notamment sur les récits populaires et scientifiques autour des primates déjà évoqués). J’avoue, néanmoins, être moins intéressée par la façon dont la proposition de Franke et Peleg interroge le modèle classique de l’exposition que par la portée de leur hypothèse. Selon les deux commissaires, si aujourd’hui les rapports entre humains et non-humains sont devenus centraux, entrainant un changement de point de vue à la fois sur ce qu’est l’humain et sur la centralité ancestrale de l’Homme dans le monde (l’humanisme traditionnel), c’est parce que nous évoluons désormais dans un milieu technologique particulier, fondé sur l’interaction constante entre acteurs humains et non-humains et mettant à mal les frontières classiques entre sujet et objet. Autrement dit, selon la thèse de Franke et Peleg, les deux chantiers de recherche que j’ai vaguement exposé dans ce blog – les drones (et leur « subjectivité machinique ») et l’animisme (dans ce qu’il implique en termes de repositionnement de l’humain au sein d’un monde vivant plus vaste) – ne seraient peut-être que deux aspects d’un même tournant général.

L’article Ape Culture est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/11/05/ape-culture/feed/ 0
Une fille, un drone – et un pilote cascadeur. http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/17/une-fille-un-drone-et-un-pilote-cascadeur/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/17/une-fille-un-drone-et-un-pilote-cascadeur/#respond Mon, 17 Aug 2015 10:13:45 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=288 Un film, c’est une fille et un pistolet, répète Jean-Luc Godard depuis les années 1960, en citant Griffith*. À chaque fois que je vois cette photographie de la jeune Norma Jeane, je ne peux m’empêcher de penser à Godard. Et …

Lire la suite

L’article Une fille, un drone – et un pilote cascadeur. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>

Norma Jeane Dougherty, photographiée par David Conover (version colorisée) publiée dans Yank, the Army Weekly, le magazine des Forces armées des États-Unis, 26 juin 1945.

Un film, c’est une fille et un pistolet, répète Jean-Luc Godard depuis les années 1960, en citant Griffith*. À chaque fois que je vois cette photographie de la jeune Norma Jeane, je ne peux m’empêcher de penser à Godard. Et si, dans notre monde contemporain, la boutade était en passe de devenir : le cinéma (et avec lui un ensemble de productions télévisuelles), c’est une fille et un drone ? C’était un peu la morale de l’histoire dans Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow, où les images de Jessica Chastain, contemplant les écrans dans la « Predator Bay » de la CIA, ne laissaient pas l’ombre d’un doute sur les héros de la capture de Ben Laden…

Mais revenons à Norma Jeane. Sur la photographie, elle n’avait alors que 18 ans, elle ne s’appelait pas encore Marylin Monroe et elle était toujours châtain. Au printemps 1944, la jeune Norma Jeane travaille 10 heures par jour dans une firme aéronautique située à Burbank, en Californie. Son mari, engagé dans la marine marchande, se trouve alors dans le Pacifique Sud. La petite histoire veut que Norma Jeane s’ennuie et que sa belle-mère lui trouve un emploi à la Radioplane Company : elle y inspecte des parachutes et peint au pistolet des fuselages de drones radiocommandés, utilisés dans le cadre de l’entrainement des artilleurs et destinés à être abattus (autrement dit, des target drones). En effet, l’histoire des drones ne commence pas dans les années 1960, avec l’utilisation par l’armée américaine de drones de reconnaissance lors de la guerre du Vietnam ; elle remonte à bien avant, aux années de la Première Guerre Mondiale, quand Français et Allemands se disputent l’invention des vedettes et des avions commandés à distance, avant que le Royaume-Uni et les Etats-Unis ne prennent le relais de la recherche.

Norma Jeane se fait photographier par David Conover, un photographe militaire appartenant à la First Motion Picture Unit et dont la mission était de documenter dans des usines militaires la participation de la gent féminine dans l’effort de guerre. Le capitaine qui en avait eu l’idée – un certain Ronald Reagan ! – rêvait sans doute de trouver des visages jeunes et jolis pour incarner Rosie, the Riveter. Mais Conover a fait mieux : avec ses clichés (qui feront la une du magazine Yank), il lançait la carrière de celle qui allait bientôt devenir la star ultime d’Hollywood.

Norma Jeane Dougherty, photographiée par David Conover (version colorisée) publiée dans Yank, the Army Weekly, le magazine des Forces armées des États-Unis, 26 juin 1945.

Norma Jeane Dougherty, photographiée par David Conover (version colorisée) publiée dans Yank, the Army Weekly, le magazine des Forces armées des États-Unis, 26 juin 1945.

À vrai dire, c’est moins Norma Jeane qui m’intéresse que l’usine dans laquelle elle travaille, la Radioplane Company. Il s’agit d’une entreprise créée par Reginald Denny : un aéromodéliste amateur, ayant combattu dans les Royal Flying Corps pendant la Première Guerre Mondiale et qui plus est acteur de cinéma (et pas n’importe lequel, puisqu’il est, avant l’invention du sonore, l’acteur britannique le mieux payé à Hollywood après Chaplin). La Radioplane Company vendra, pendant la guerre, 15 000 drones cible à l’armée américaine (la compagnie se fera racheter dans les années 1950 par la Northrop, aujourd’hui une des plus grandes entreprises d’armement au monde). Si, comme le note Grégoire Chamayou dans sa Théorie du drone, celui-ci est né en partie à Hollywood, il faudrait y ajouter qu’il y naît non seulement « sous le signe du faux-semblant », mais aussi sous les auspices du spectacle. Curieusement (ou peut-être pas), Reginald Denny était aussi pilote-cascadeur, assurant dans des films la réalisation de manœuvres aériennes périlleuses et, bien sûr, spectaculaires. Non seulement les années de l’entre-deux-guerres assistent, émerveillées, au développement exponentiel de l’acrobatie et du voltige aériens, mais l’industrie du cinéma ne vit plus sans les exploits incroyables et extravagants d’une armée de daredevils anonymes qui mettent leurs vies en danger pour que le spectacle continue toujours de plus belle. Aujourd’hui, au moment où les doublures numériques envahissent nos écrans, les folles cascades hollywoodiennes sont désormais l’affaire de stunt drones ayant libéré la caméra des quelques rares contraintes qui la limitaient encore. Ils assurent, dans la tradition du Steadycam, des mouvements fluides, stables et aériens. Autrement dit, il suffit presque de regarder n’importe quel film d’action contemporain pour comprendre à quel point le cinéma (du moins le cinéma hollywoodien), est devenu une fille et un drone.

* Sur les origines de cette expression et ses vicissitudes dans l’œuvre de Jean-Luc Godard, consultez l’excellent billet du blog Ciné-tourist.

L’article Une fille, un drone – et un pilote cascadeur. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/17/une-fille-un-drone-et-un-pilote-cascadeur/feed/ 0
Machine sans nerfs que tout émeut : phénoménologie de la voix des drones. http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/10/machine-sans-nerfs-que-tout-emeut-phenomenologie-de-la-voix-des-drones/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/10/machine-sans-nerfs-que-tout-emeut-phenomenologie-de-la-voix-des-drones/#respond Mon, 10 Aug 2015 08:37:13 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=280 Gabriel Abrantes, “Ennui Ennui” (extrait), 2013, 33’30 min. Prod. Les Films du Bélier. En 1919, dans les pages de Lectures pour tous on louait « les étonnants résultats » que l’on pourrait attendre de cette « machine sans nerfs que rien n’émeut », qu’était …

Lire la suite

L’article Machine sans nerfs que tout émeut : phénoménologie de la voix des drones. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>


Gabriel Abrantes, “Ennui Ennui” (extrait), 2013, 33’30 min. Prod. Les Films du Bélier.

En 1919, dans les pages de Lectures pour tous on louait « les étonnants résultats » que l’on pourrait attendre de cette « machine sans nerfs que rien n’émeut », qu’était l’avion sans pilote : « bombardements à longue distance, photographie automatique de paysages ou de scènes animées, levées d’itinéraires, explorations de régions interdites ou d’accès difficile, poste aérienne, convoyage du personnel et du matériel par delà les monts et les mers ». En somme, le drone était né, même si l’objet technique qui lui correspondait allait encore mettre quelques années à être affiné.

« Machine sans nerfs que rien n’émeut » semble être une description assez juste des drones – en particulier des drones militaires qui arpentent désormais sans cesse les cieux de la planète. Mais à en croire l’imagination de certains, les drones pourraient justement s’émouvoir, parvenant ainsi à s’émanciper des humains qui les dominent (ou, au moins, à établir avec eux de nouveaux rapports). Deux travaux récents l’illustrent particulièrement bien : l’installation vidéo The Freestone Drone de l’artiste anglais George Barber (2013) et le film Ennui, Ennui de l’artiste luso-américain Gabriel Abrantes (2013). La première est une sorte de méditation lyrique aux accents markeriens sur un drone devenu conscient, le deuxième un conte sardonique et loufoque sur une princesse afghane et un drone pré-adolescent.

Ce qui m’intéresse dans ces deux films, c’est la voix des drones. Dans les deux cas, il s’agit de voix métalliques, incarnées dans le corps de ces grandes machines volantes que sont les drones. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, leurs voix ne sont pas bourdonnantes : elles ont une tessiture un peu aigüe et enfantine, la voix du drone d’Abrantes pouvant même être décrite comme une voix de fausset si le drone en question n’était pas du genre féminin (contrairement au drone de Barber). La voix du drone d’Ennui, Ennui oscille entre le mielleux et le plaintif, notamment lors des conversations qu’elle entretient avec son daddy, le président Barack Obama. Elle correspond ici à une technologie de construction (genrée) du soi : le drone en question est fragile et ressent le besoin d’être aimé – tandis que le drone de Barber veut aimer). En somme, les drones de Barber et d’Abrantes sont des machines sans nerfs que tout émeut.

Un drone qui parle, c’est une drôle d’idée – si ce n’était que nous sommes aujourd’hui entourés de machines parlantes, qui nous rappellent, par exemple, qu’il faut tourner à gauche dans deux cent mètres. Mais qu’est-ce que la voix d’une machine ? Doit-elle se distinguer d’une voix humaine ? Est-elle nécessairement genrée ? Pourquoi la plupart des machines parlantes assument-elles des voix féminines ? Et que peuvent ses voix concrètement ?

L’article Machine sans nerfs que tout émeut : phénoménologie de la voix des drones. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/10/machine-sans-nerfs-que-tout-emeut-phenomenologie-de-la-voix-des-drones/feed/ 0
Sur les images à charge – et leur pensée cartographique. http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/03/sur-les-images-a-charge-et-leur-pensee-cartographique/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/03/sur-les-images-a-charge-et-leur-pensee-cartographique/#respond Mon, 03 Aug 2015 10:20:07 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=275 Le BAL présente jusqu’au 30 août prochain une exposition intitulée « Images à charge. La construction de la preuve par l’image » et consacrée « à l’image produite en tant que preuve par des experts, chercheurs et historiens dans des cas de crimes …

Lire la suite

L’article Sur les images à charge – et leur pensée cartographique. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
Protocole d’Alphonse Bertillon, Assassinat de monsieur Canon, boulevard de Clichy, le 9 décembre 1914 : vue par renversement / Préfecture de police de Paris, Service de l’Identité judiciaire. © Archives de la Préfecture de police de Paris.

Protocole d’Alphonse Bertillon, Assassinat de monsieur Canon, boulevard de Clichy, le 9 décembre 1914 : vue par renversement / Préfecture de police de Paris, Service de l’Identité judiciaire. © Archives de la Préfecture de police de Paris.

Le BAL présente jusqu’au 30 août prochain une exposition intitulée « Images à charge. La construction de la preuve par l’image » et consacrée « à l’image produite en tant que preuve par des experts, chercheurs et historiens dans des cas de crimes ou de violences individuelles ou collectives ». À propos de cet événement, j’aimerais revenir sur ce que j’appelle la pensée cartographique des images. Ceci n’est donc pas une critique d’exposition : je ne dirai rien sur la dimension scénographique d’Images à charge (au sens où exposer est, littéralement, disposer dans un espace de manière à mettre en vue), aspect qui me semble, parfois, quelque peu problématique (notamment au sous-sol, où l’agencement entre certains « chapitres » est, pour moi, loin d’être aussi fluide conceptuellement qu’on ne pourrait l’imaginer). Mais en discutant de la dimension cartographique de certaines images exposées, cette petite note s’intéresse à une question majeure suscitée par le montage de l’exposition : la façon dont on passe du crime individuel (globalement illustré dans la première salle) au crime de masse (et même au génocide). Ces évènements ne sont pas du même ordre, ni dans les domaines de la criminologie, ni du droit, ni de la philosophie, le crime génocidaire se distinguant, en particulier, par un ensemble de ruptures et de difficultés épistémologiques, dont je ne suis pas spécialiste. Néanmoins, la plupart des images présentes dans l’exposition (je dis bien la plupart et pas toutes) nous permettent d’identifier un fil rouge reliant la photographie métrique de scènes de crime mise au point par Alphonse Bertillon à la fin du XIXe siècle à la cartographie des fosses communes dans le Kurdistan Irakien. D’un point de vue iconique, et parfois strictement protocolaire (en amont, donc, de la question rhétorique de la preuve), ce fil rouge est pour moi la dimension cartographique de certaines photographies. Que celle-ci soit importante pour comprendre la façon dont on établit des faits et comment on construit des preuves par l’image, voici un autre point sur lequel il faudrait insister.

Parler de cartographie à propos de ces images est peut-être étonnant, quitte à comprendre celle-ci en un sens élargi et englobant notamment des représentations graphiques très différentes, mais facilitant toutes une compréhension spatiale des choses ou des événements du monde. Si on se penche sur la photographie métrique de scènes de crime mise au point par Alphonse Bertillon – qui fait figure, à très juste titre, de phénomène primordial –, on constate à quel point celle-ci est fondée sur un idéal d’exactitude topographique, dont le but est de recréer spatialement la scène du crime en fonction d’un protocole très rigide (choix du point de vue surplombant, qui contribue à transformer les corps étendus par terre et autres objets en des surfaces topographiques dont on peut restituer les dimensions ; recours systématique à de grands angulaires fortement diaphragmés ; collage des photographies sur des cartons munis d’« encadrements perspectomètres » et d’« échelles métriques » permettant, grâce à l’emploi d’un abaque redresseur, de tracer un croquis planimétrique à partir de l’image). À la cartographie du corps esquissée par les portraits anthropométriques de Bertillon (réactualisée lors de l’affaire Mengele, grâce aux développements de la pratique médico-légale et de l’image vidéo) correspond ainsi une minutieuse topographie des lieux du crime, appuyée désormais sur les moyens mécaniques de la photographie, qui fixe avec une « exactitude » nouvelle les mille détails que s’y trouvent « dissimulés »*. S’ils sont aujourd’hui susceptibles d’être appréciés pour leurs qualités documentaires et visuelles (cela est particulièrement évident à propos des photographies de Rodolphe Reiss, dont la présentation dans l’exposition évoque l’art conceptuel), ces clichés demandent, au moment de leur réalisation, à être regardés par un œil entraîné, capable de les examiner, de les décomposer et, surtout, de les mesurer.

Saint-Suaire de Turin : mains, suintements séreux sur les doigts, et en bas le sang décalqué au fond d’un pli, plaie mise au dos de la main gauche, dans la région du carpe, par un clou vaguement polygonal de 6 à 7 millimètres d’épaisseur. Tirage réalisé d’après agrandissement de cliché de Giuseppe Enrie (1931-1933). Fonds Paul Vignon ©Institut catholique de Paris, Bibliothèque de Fels.

On retrouve cette même pulsion cartographique dans les photographies du Saint-Suaire réalisées par Paul Vignon dans les années 1930, dont certaines sont complétées par des signes graphiques qui permettent à l’observateur de les déchiffrer. Je ne connaissais pas ces clichés qui m’ont fait penser à un commentaire de Rosalind Krauss sur l’exigence interprétative de la photographie aérienne. Selon Krauss, celle-ci

« dévoile une déchirure dans le tissu de la réalité, une déchirure que la plupart des photographes au sol tentent ardemment de masquer. Si toute la photographie promeut, approfondit et encourage notre fantasme d’un rapport direct au réel, la photographie aérienne tend – par les moyens mêmes de la – à crever la baudruche de ce rêve. »**

Les clichés de Paul Vignon ne sont pas des photographies aériennes – mais ils partagent avec elles — et en particulier avec les photographies de Douaumont prises lors de la Première Guerre Mondiale et présentées au sous-sol de l’exposition – cette même « déchirure ». Si face aux clichés de Vignon nous sommes, parfois, devant des images abstraites, face aux photographies aériennes d’avant et d’après les bombardements, nous sommes devant des cartes minimales auxquelles les interprètes au service des unités de renseignement de l’armée ajoutent des légendes. Il n’est pas étonnant, d’ailleurs, que ces photographies soient présentées à côté de relevés cartographiques, tout comme, d’ailleurs, les clichés réalisés lors de la mission d’une équipe internationale d’experts médico-légaux dans le village de Koreme, dans le Kurdistan iraquien. La photographie s’inscrit ici au sein de pratiques – la surveillance militaire, la science — pour lesquelles la compréhension spatiale et l’exactitude topographique sont déterminantes, la carte constituant une sorte de matrice opérationnelle. Dans ce contexte, c’est cette matrice opérationnelle qui rajoute à l’image photographique une part de son efficacité documentaire en tant qu’image : le cliché n’est pas une carte, mais à côté d’un relevé cartographique (ou en mimant, parfois, les caractéristiques de la carte) son pouvoir d’attestation se voit augmenté. J’ajouterai, en amont et toujours à propos de la pensée cartographique de ces images, que même le « Livre de la destruction » (l’inventaire initié par le ministère des Travaux publics et du Logement à Gaza, intitulé A Verification of Building – Destruction Resulting from Attacks by the Israeli Occupation) constitue une sorte d’atlas en cours des bâtiments détruits ou endommagés lors des attaques israéliennes ; et que les revendication des bédouins sur leurs terres dans le désert du Néguev (dernier chapitre de l’exposition) sont une affaire nécessairement cartographique.***

  

Relevé cartographique avec échelle et orientation de la tombe A Sud, niveau 2, établi par James Briscoe, archéologue, membre de l’équipe d’experts médico-légaux en mission pour Middle East Watch et Physicians for Human Rights, mai-juin 1992 © James Briscoe pour Human Rights Watch et Physicians for Human Rights, 1993

Relevé cartographique avec échelle et orientation de la tombe A Sud, niveau 2, établi par James Briscoe, archéologue, membre de l’équipe d’experts médico-légaux en mission pour Middle East Watch et Physicians for Human Rights, mai-juin 1992
© James Briscoe pour Human Rights Watch et Physicians for Human Rights, 1993

Je conclus, pour ne pas allonger un billet déjà un peu long, en revenant sur la question de l’événement : crime individuel, crime de masse, génocide. Il s’agit, comme il a déjà été souligné, d’événements fort différents, à la fois d’un point de vue criminel, juridique ou philosophique. Que fait l’image – et en particulier l’image scientifique (ou « forensique ») ? Elle les homogénéise. En ce sens, l’exposition Images à charge nous raconte en filigrane une histoire qui n’est pas seulement celle du comment le pouvoir d’attestation de l’image photographique a été construit, mais aussi du comment les images propres à la science criminalistique se sont confrontées à l’atrocité et au « Mal ». Je reviens encore sur l’exemple de Bertillon : ses photographies métriques surgissent dans un paysage visuel où les images de crimes violents prolifèrent, que ce soient des photographies, des lithographies ou des gravures relayées par une presse avide de fait-divers. Ce qu’elles proposent face au sensationnalisme et à la subjectivité d’un point de vue quelconque, c’est de maîtriser et de rationaliser ce qui se présente alors, en termes éthiques et moraux, comme le symptôme de forces et de pulsions irrationnelles et immaîtrisables. Autrement dit, à l’intérieur du chaos, les photographies métriques essayent d’instaurer l’ordre – et en cela, elles sont toujours très proches des images contemporaines présentées dans l’exposition. Il convient ainsi d’examiner ces images non seulement comme des images pour une science – la criminalistique –, mais aussi comme des images de la science – en particulier d’une science qui se confronte dans son discours à l’horreur.

* La vidéo « Attaque de drone a Miranshah », présentée par Eyal Weizman et Forensic Architecture peut aussi être pensée comme réactualisant dans un environnement numérique les préceptes des photographies métriques de Bertillon – mais je réserve cette question pour un autre billet.

** R. Krauss, « Emblème ou lexies : le texte photographique », L’Atelier de Jackson Pollock. Hans Namuth, Paris, Macula, 1978, s.p.

*** Ceux qui ont déjà visité l’exposition auront remarqué que je n’ai mentionné ni les images du procès de Nuremberg (elles ne se prêtent pas à mon argument cartographique), ni l’installation présentant des portraits de condamnés lors de la Grande Terreur en URSS (pour moi œuvre très problématique et qui échappe, en amont, à ce même fil cartographique).

L’article Sur les images à charge – et leur pensée cartographique. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/08/03/sur-les-images-a-charge-et-leur-pensee-cartographique/feed/ 0
“Flying and Spying: a Renaissance Dream Comes True”, by Zoltán Biedermann. http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/24/flying-and-spying-a-renaissance-dream-comes-true-by-zoltan-biedermann/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/24/flying-and-spying-a-renaissance-dream-comes-true-by-zoltan-biedermann/#comments Fri, 24 Jul 2015 08:28:38 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=166 Zoltán Biedermann est historien de l’époque moderne et de la cartographie. Il revient dans ce texte sur certains modes de vision de la Renaissance et leur lien potentiel avec la vision des drones. Un grand merci à Zoltán! There was …

Lire la suite

L’article “Flying and Spying: <br>a Renaissance Dream Comes True”, by Zoltán Biedermann. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>

Jacopo de’ Barbari; Anton Kolb, Italian (Venetian), c. 1460/70-before 1516.
View of Venice, 1500. Woodcut from six blocks on six sheets of paper, 132.72 x 277.5 cm (sheet), 153.35 x 300.04 cm (outer frame). Minneapolis Institute of Arts, The John R. Van Derlip Fund 2010.88. Photo: Minneapolis Institute of Arts

Zoltán Biedermann est historien de l’époque moderne et de la cartographie. Il revient dans ce texte sur certains modes de vision de la Renaissance et leur lien potentiel avec la vision des drones. Un grand merci à Zoltán!

There was a new kind of trouble last year at Kanye West’s and Kim Kardashian’s Hollywood Hills home: a drone hovered above the pool while their daughter was learning to swim. Does it worry you? According to the British tabloid Daily Mail, it should. Because drones will “soon be a regular fixture over YOUR home” (Daily Mail, 6.9.2014). And why would anyone bother to send a drone into the air above my, your, or anyone else’s place? The thing with drones is, they respond to a deeply rooted desire we all have: not just to fly, not just to spy, but to do both things at the same time.

Of course the idea of flying, or at least of building an object that flies, is pretty old. The Chinese invented the bamboo-copter around 400BCE. And of course the idea of mapping things, which more often than not implies an elevated viewpoint, goes back even further into the depths of human history. But the modern Western obsession with looking at things from above and putting them into a framed picture seems to have emerged at a rather precise moment, in the late 1400s. It was a strange combination of two processes that came intertwined.

Francesco_Rosselli_-_View_of_Florence_with_the_Chain_-_WGA20082

Francesco Rosselli, View of Florence with the Chain, 1480s, woodcut, 584 x 1315 mm.

1: The eye of the observer started to go up into the air. The point of view imagined by artists representing cities went higher and higher. A famous vista of Florence by Francesco Rosselli, most commonly dated to the early 1480s, shows the city as seen from a hillside. It doesn’t matter that the viewpoint as such does not exist in the actual landscape. The artist can be seen sitting there, taking in the view and putting it on paper. Less than twenty years later, a view of Venice made furore where the eye of the observer was as high up in the air as a bird flying on a clear summer day. Then, a couple of years later, Leonardo da Vinci came up with an even more radical solution. In a view of Imola, he construed a completely artificial plan, where every spot is seen from a perfectly zenithal point of view. It was an impressive feat. And yet the vista was a bit of a flop.

Leonardo da Vinci, Plan of Imola, 1502. Pen and ink, with coloured washes, and stylus lines, over black chalk  44.0 x 60.2 cm. Royal Collection Trust / © HM Queen Elizabeth II 2015

Leonardo da Vinci, Plan of Imola, 1502.
Pen and ink, with coloured washes, and stylus lines, over black chalk
44.0 x 60.2 cm. Royal Collection Trust / © HM Queen Elizabeth II 2015

2: It was a flop because this was also a time of great developments in portraiture. Cities, like their inhabitants, wanted their picture to be taken, and taken out into the world. Whilst the first two vistas looked quite appealing as portraits, the last just didn’t. Leonardo may have proven his genius here as a mapmaker, but ultimately people found the result of his efforts dull. No streets, no windows to peak into, just geometrically construed, abstract urban space. It took another three centuries before such city plans became hegemonic. And today (perhaps as a sign of our postmodern condition) the slightly lower bird’s eye view is again a strong competitor of vertical views. It is, most spectacularly, what the Eyewitness travel guides have relied on to build their global empire.

But let’s come back to those Renaissance city portraits for a minute. Have you been to Venice recently? Did you take a map and still got lost? Perhaps you should have tried the vista made in 1500. It’s attributed to Jacopo de’ Barbari, though the name hides a much larger effort involving surveyors, engravers, investors, printers and paper-makers.

Here, then, is a dramatic expression of the desire to fly and see stuff from above in the Renaissance. No-one could go into the sky, but the technology to simulate flight was put in place so that people could see from far above. It was a matter of a) climbing bell towers to look at other towers and measure angles, b) walking along streets measuring distances and c) crunching the data with the help of complex mathematical formulae to build an artificial image. Oh, and then you needed the money and the material to actually put things on paper. That meant wooden plates of an exceptional size and quality; highly skilled engravers from, possibly, Germany; sheets of paper larger than anything that was available on the market; and a printing workshop that could handle all this. The result is, at almost three metres wide, quite a lot bigger than your average map.

No wonder only a city like Venice could afford such a costly selfie, and not many copies were printed either. To see one, you can travel to Venice and visit the Museo Correr on the Piazza di San Marco – provided of course you find it, or to the Minneapolis Institute of Arts.

Jacopo de’ Barbari; Anton Kolb, Italian (Venetian), c. 1460/70-before 1516.
View of Venice (detail), 1500. Woodcut from six blocks on six sheets of paper. Minneapolis Institute of Arts, The John R. Van Derlip Fund 2010.88. Photo: Minneapolis Institute of Arts

The detail is stunning. As I fly across the Venetian sky and come down here and there for a close-up, I imagine peeking through windows into the lives of the Serenissima’s splendid citizenry. Sex, crime and conspiracy are behind every pair of curtains. I love it. Who wouldn’t? If they had been given the opportunity, the Venetians would have had drones, plenty of drones all over the place.

Zoltán Biedermann
University College London

L’article “Flying and Spying: <br>a Renaissance Dream Comes True”, by Zoltán Biedermann. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/24/flying-and-spying-a-renaissance-dream-comes-true-by-zoltan-biedermann/feed/ 1
Deux revues et un peu de drone music. http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/17/deux-revues-et-un-peu-de-drone-music/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/17/deux-revues-et-un-peu-de-drone-music/#respond Fri, 17 Jul 2015 13:54:36 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=231 Si vous avez envie de lire sur les rapports entre drones, cinéma et art contemporain pendant les vacances, je vous signale la parution récente de deux revues : – un numéro double de la revue suisse Décadrages (certes, paru en Octobre dernier, …

Lire la suite

L’article Deux revues et un peu de <i>drone music</i>. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>

Si vous avez envie de lire sur les rapports entre drones, cinéma et art contemporain pendant les vacances, je vous signale la parution récente de deux revues :

– un numéro double de la revue suisse Décadrages (certes, paru en Octobre dernier, mais que je n’ai pu me procurer que récemment), dirigé par Claus Gunti et intitulé « Drones, cartographies et images automatisées ». Le numéro inclut (parmi d’autres articles très approfondis, signés Alain Boillat, Selim Krichane, Claus Gunti, Laurence Kubski, Marc-André Weber et Joël Vacheron) une traduction d’un texte de Derek Gregory, « Géographies du drone ». Vous pouvez télécharger l’éditorial du numéro sur le site de Décadrages, ici.

Lancement de la revue MCD #78 au Jeu de Paume, Paris. Jeudi 25 juin © Jeu de Paume

– le dernier numéro du Magazine des Cultures Digitales, coordonné par Agnès de Cayeux et Marie Lechner, intitulé « La conjuration des drones » et dont l’éditorial est accessible ici. Le numéro a été lancé récemment au Jeu de Paume : voici le podcast de la présentation. À cette occasion, plusieurs contributeurs présents (parmi lesquels les deux coordinatrices de la revue, ainsi qu’Anne Zeitz, Carine Claude, Maëlla-Mickaëlle Maréchal, Philippe Di Folco, Hortense Gauthier, Dorothée Smith) avaient évoqué leurs textes, couvrant une multitude de sujets liés aux drones et à la façon dont ils s’insinuent plus ou moins discrètement dans différents domaines de la création contemporaine. L’auteur et artiste sonore Jean-Philippe Renoult, qui signe un article fort intéressant intitulé « Dr[1](o)ne Music », nous avait alors passé un morceau de Kyema, Intermediate State d’Eliane Radigue. Je vous laisse ici écouter la première partie de sa sublime Trilogie de la mort (1998).

References

References
1 (o

L’article Deux revues et un peu de <i>drone music</i>. est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/17/deux-revues-et-un-peu-de-drone-music/feed/ 0
“GODS KILL” par Emmanuel Siety http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/03/gods-kill-par-emmanuel-siety/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/03/gods-kill-par-emmanuel-siety/#respond Fri, 03 Jul 2015 08:00:03 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=145 Ce billet est la première de plusieurs invitations à venir et il a été rédigé par mon collègue Emmanuel Siety, maître de conférences en études cinématographiques et audiovisuelles à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Qu’il soit vivement remercié pour …

Lire la suite

L’article “GODS KILL”<br> <small>par Emmanuel Siety</small> est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
Ce billet est la première de plusieurs invitations à venir et il a été rédigé par mon collègue Emmanuel Siety, maître de conférences en études cinématographiques et audiovisuelles à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Qu’il soit vivement remercié pour cette contribution – qui revient, de façon un peu plus détaillée, sur le film Good Kill d’Andrew Niccol. Teresa Castro.

Good Kill d'Andrew Niccol, 2014

Good Kill d’Andrew Niccol, 2014

Si les campagnes politiques sont affaire de « storytelling », il semble que les relations internationales, et en particulier leur forme extrême qu’est la guerre, soient affaire de « narrative ». Si vous faites la guerre, il vaut mieux que vous ayez des arguments, mais il vous faut aussi une histoire à raconter, et une histoire plutôt aristotélicienne, avec un début, un milieu et une fin, avec un conflit et une résolution.

Le recours accru aux drones (non seulement pour surveiller, mais aussi pour effectuer des frappes) de la part de l’armée américaine sous la présidence de Barack Obama, a son narrative. C’est précisément contre lui qu’est bâti le rapport Living under drones*, publié en 2012 :

« In the United States, the dominant narrative about the use of drones in Pakistan is of a surgically precise and effective tool that makes the US safer by enabling “targeted killing” of terrorists, with minimal downsides or collateral impacts. This narrative is false. »

Il y a plusieurs façons de lutter contre une « histoire ». Par des données chiffrées, et par d’autres histoires (par exemple, Living under drones recueille des témoignages des populations locales vivant « sous les drones »). Ici le cinéma a son mot à dire.

Sorti au mois d’avril 2015, le film Good kill d’Andrew Niccol raconte une histoire pour mettre à l’épreuve le narrative officiel. Disons en deux mots que le film est assez édifiant et efficace jusqu’à la séquence finale qui, en introduisant in extremis un narrative de rédemption par le meurtre (avec feu vert donné au spectateur pour en jouir sans entrave), ne fait rien moins que reprendre, habilement travesties, les bases du récit adverse.

Good Kill d’Andrew Niccol, 2014

Mais ce qui est intéressant dans ce film, c’est que son sujet, les drones militaires, consiste en un dispositif d’observation et d’action à distance, de mise en relation d’espaces-temps dont le film doit négocier la mise en concurrence avec les figures classiques du récit cinématographique (montage alterné, raccord de regard, rapports de causalité…).

Le film articule deux foyers narratifs : l’intérieur du caisson de pilotage où cohabitent cinq protagonistes, dont Egan qui assure le pilotage et le tir, et une jeune recrue, Suarez, chargée de la surveillance du site à travers les images transmises par le drone ; l’extérieur du caisson, où nous suivons Egan rentrer chez lui et retrouver sa femme et ses enfants.

Chacun à sa manière, ces deux foyers sont en crise narrative.

À l’extérieur, le problème pour le personnage est que ses dispositions à entrer en relation avec autrui sont complètement asséchées par l’expérience vécue à l’intérieur du caisson. Andrew Niccol traduit cela notamment en faisant en sorte que le dispositif-cinéma se trouve contaminé par le dispositif-drone : vues aériennes des pavillons et du désert, véhicules sur l’autoroute comme filmés par un drone clandestin.

À l’intérieur du caisson, la difficulté pour Niccol est, à l’inverse, d’injecter du cinéma, de créer du récit (suspense, empathie…) là où il n’est pas très évident qu’il y en ait spontanément (dans un tout autre contexte, un documentaire comme Missile, de Frederick Wiseman, soulignait au contraire la dimension strictement procédurale de l’action militaire). La stratégie du film est ici de gommer la médiation technique entre le pilote et sa coéquipière d’un côté, les populations ciblées par les drones de l’autre. Niccol évite pour cela les plans larges de l’habitacle, privilégie les plans rapprochés sur les regards et les mains, baigne l’ensemble dans une pénombre bleutée d’aquarium. D’autre part il filme plus volontiers les écrans de contrôle plein cadre, accusant une proximité avec les silhouettes humaines du bout du monde. Vers la 17e minute, les images de drones sont véritablement détournées à des fins cinématographiques : une douce musique orientalisante à la flûte accompagne des images qui ont vocation à dépeindre le labeur quotidien des femmes, la vie de tous les jours, un enfant jouant à la balle, une femme brossant sa longue chevelure. Non plus des images de surveillance, mais des images à haute valeur ajoutée en pittoresque.

Jason and the Argonauts, de Don Shaffey, 1963

Jason and the Argonauts, de Don Shaffey, 1963

« J’ai toujours l’impression qu’ils peuvent nous voir », dit Suarez. Mais non. Les Américains dans leur caisson près de Las Vegas sont à cet instant comme des dieux bienveillants et attendris (voir Hera veillant sur Jason depuis l’Olympe, dans Jason et les Argonautes de Don Shaffey), comme aussi lorsqu’ils sont requis de surveiller une zone pour permettre à une patrouille épuisée de dormir. Bien plus tard, vers 1h18, Egan raconte à sa femme le bombardement d’un enterrement et les images de drones sont à nouveau détournées, soustraites à leur origine technique avec la même soutien musical, pour figurer des images mentales du personnage traumatisé. C’est le seul moment où sa femme semble comprendre ce que vit Egan, et pleure, émue par son mari provisoirement transfiguré en « storyteller ».

Les deux manœuvres ne sont pas équivalentes. La première (devenir-image-de-drone du réel) est une manœuvre discursive, elle invente une manière de dire la crise du personnage. Mais la seconde (devenir-film du pilotage de drones) est au contraire dissimulée en vertu de la transparence du récit classique dont Niccol ne croit pas pouvoir se passer pour susciter l’adhésion du spectateur. Or c’est aussi ce qui l’entraîne dans un scénario compassionnel dont la résolution finale met à mal le projet du film. Niccol aurait gagné à revoir la fin de l’Invraisemblable vérité de Fritz Lang ou bien, comme Ulysse, à s’attacher au mât de son navire pour affronter les sirènes du narrative.

* Rapport établi par la Stanford International Human Rights and Conflict Resolution Clinic (IHRCRC) et la Global Justice Clinic (GJC) at NYU School of Law

L’article “GODS KILL”<br> <small>par Emmanuel Siety</small> est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/07/03/gods-kill-par-emmanuel-siety/feed/ 0
Le coup d’œil militaire http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/06/30/le-coup-doeil-militaire/ http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/06/30/le-coup-doeil-militaire/#respond Tue, 30 Jun 2015 11:01:08 +0000 http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/?p=134 J’étais de passage à Tours la semaine dernière, où j’ai découvert, au Musée des Beaux-Arts, un ensemble de trois tableaux célébrant les campagnes militaires de Louis XIII et de Richelieu (Le Combat du Pas-de-Suse, La Capitulation de Privas et La …

Lire la suite

L’article Le coup d’œil militaire est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
Good Kill d'Andrew Niccol, 2014

Good Kill d’Andrew Niccol, 2014

J’étais de passage à Tours la semaine dernière, où j’ai découvert, au Musée des Beaux-Arts, un ensemble de trois tableaux célébrant les campagnes militaires de Louis XIII et de Richelieu (Le Combat du Pas-de-Suse, La Capitulation de Privas et La Prise de Pignerol). En regardant ces images oscillant entre peinture d’histoire, vue de paysage et cartographie, je me suis rappelée la notion de coup d’œil militaire. Il s’agit d’une formule répandue pendant l’Ancien Régime, et plus particulièrement au XVIIIe siècle, quand le coup d’œil devient un véritable régime du regard, bien plus complexe qu’on ne pourrait l’imaginer (comme je l’appris récemment en écoutant une présentation passionnante de l’historienne de l’art Charlotte Guichard). Le coup d’œil militaire a même droit à une entrée dans l’Encyclopédie, où on le définit comme « l’art de connoitre la nature & les différentes situations du pays, où l’on fait et où l’on veut porter la guerre, les avantages & les désavantages des camps & des postes que l’on veut occuper, comme ceux qui peuvent être favorables ou desavantageux à l’ennemi ». Si le coup d’œil militaire est la prérogative des généraux et des grands capitaines, il s’entraîne et il se perfectionne, afin de tout voir et de tout prévoir ; en ce sens, « rien (…) ne contribue davantage à former le coup d’œil que l’exercice de la chasse », lit-on toujours dans l’Encyclopédie.

Vous me voyez venir et me soupçonnez de vouloir faire un lien entre le coup d’œil des Lumières et la vision des drones militaires d’aujourd’hui. Vous avez vu juste, cependant je précise tout de suite qu’il ne s’agit pas d’insinuer que la conséquence (téléo-)logique de cette vieille idée sont nos drones contemporains. À vrai dire, entre le coup d’œil militaire d’antan et celui d’aujourd’hui, il y a des différences significatives ; n’empêche que la vision des drones est devenue, à bien des égards, le coup d’œil militaire des temps modernes. Mais peut-on vraiment parler de coup d’œil quand ces machines enregistrent et transmettent en temps réel et en continu des images ? L’un des enjeux de cette vision militaire n’est-il pas de tout voir tout le temps ? Ne sommes-nous pas à l’extrême opposé du regard rapide et donc temporellement limité du coup d’œil ?

Oui et non. Oui, les drones équipés de caméras enregistrent et diffusent en continu des images et ils sollicitent bien un type de posture scopique, très différente de celle du coup d’œil, et annoncée par la vidéo-surveillance. Mais en tant que regard observateur, synthétique et stratégique, le coup d’œil est loin d’être devenu obsolète. Que se passe-t-il, par exemple, à l’intérieur d’un caisson de pilotage quand il faut prendre la décision de déclencher un tir à l’aide d’un joystick ? Les pilotes se trouvent – comme dans le film Good Kill d’Andrew Niccol (2014) – face à une multitude d’écrans sur lesquels s’affichent des données en permanence et qu’il faut être capable, à un moment donné, de transformer en une occasion à saisir. Certes, le « génie » militaire repose sur une foule d’appareils et d’images automatisées ayant radicalement transformé ce qu’on appelle désormais l’intelligence topographique mais, selon la fiction de Niccol, il s’appuie encore sur une forme d’acuité visuelle et humaine et qui consisterait à faire sens de l’étalage d’informations et à juger, avec précision et efficacité, du moment auquel on frappe. Si l’intelligence du coup d’œil est l’intelligence du montage, jamais celle-ci n’est apparue si évidente comme dans ces étonnantes installations qui, en éclatant les cadres, spatialisent le montage. Toujours dans Good Kill, les signatures strikes* initiées par la CIA portent le coup d’œil militaire à son paroxysme, le soumettant désormais à une intelligence proprement artificielle, en ce qu’elle repose sur l’identification de motifs ou de formes comportementales à partir de données brutes. Le « génie » militaire s’affranchit totalement du siège humain qui était le sien à l’origine – et il accentue la détresse du protagoniste, un pilote de drones en souffrance, interprété par Ethan Hawke. Mais sur Good Kill et ses narratives, je vous renvoie à un billet rédigé par Emmanuel Siety et qui sera posté bientôt.

* Les signature strikes sont des attaques menées contre des groupes d’individus dont la « signature » ou les caractéristiques font penser à une activité terroriste, mais dont l’identité n’est pas connue avec certitude.

L’article Le coup d’œil militaire est apparu en premier sur Drones d’idées.

]]>
http://lemagazine.jeudepaume.org/blogs/teresa-castro/2015/06/30/le-coup-doeil-militaire/feed/ 0